- Judy Squires—
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Date d'inscription : 21/05/2012
Critique de la catégorie "sexualité"
17.07.12 0:46
Voilà, je voudrais lancer un nouveau sujet, qui m'est venu essentiellement en réfléchissant à certaines expériences que j'ai pu avoir, à des discussions avec d'autres personnes, à des éléments théoriques que j'ai pu lire ça et là et au fait que dans le sujet sur le projet de loi de pénalisation des clients des travailleuSEs du sexe, on manipule beaucoup cette catégorie sans jamais vraiment être capable de la définir.
Ma thèse sur la question : la sexualité est une forme-fétiche au même titre que le travail dans les sociétés capitalistes. Je veux dire par là que le travail au sens capitaliste n'est jamais défini par le type d'activité qu'il suppose mais par des dispositifs matériels qui lui sont extérieurs et des conventions arbitraires (si je fais un café quand je suis serveuse dans un bar c'est du travail, si je fais du café chez moi ce n'en est pas ; pourtant c'est le même café, les mêmes gestes etc), et dont le but est d'extorquer de la valeur au profit des propriétaires des moyens de production. De façon a priori contre-intuitive, la sexualité fonctionne exactement pareil : quand unE médecinE regarde te touche la chatte ou la bite, te fais un toucher rectal, c'est pas de la sexualité, et pourtant c'est ce type d'activité que les gens ont tendance à appeler sexuelle. Inversement, quand on a des pratiques BDSM, bah on fait un tas de trucs que des gentes font tous les jours sans considérer ça comme sexuel (genre les flics, les médecins pour les exemples les plus visuels, mais c'est vraiment pour frapper l'imagination), ou bien qu'il est difficile à première vue de considérer comme sexuel (une connaissance pute m'a raconté l'autre jour qu'un client lui proposait plusieurs centaines d'euros pour marcher sur des coquilles d'escargot devant lui (et c'est tout)). Du coup j'aimerais bien savoir ce qui nous permet de dire qu'on "fait du sexe".
Comme je suis féministe, l'hypothèse que je formule aussitôt, c'est que les définitions de la sexualité que l'on donne sans réfléchir sont fondamentalement misogynes, homophobes et âgistes (bon ça c'est plus l'expérience que la théorie qui me fait parler : il m'a fallu des années pour me rendre compte que j'ai baisé beaucoup plus tôt que je ne le croyais). C'est pas super original comme théorie jusque là, et c'est un peu obvious, donc en fait c'est pas du tout ça que j'aimerais tester. Foucault a fait dnas le tome 1 d'Histoire de la sexualité un super gros travail sur la constitution de l'objet sexualité dans le champ scientifique au XIXème. C'est super intéressant comme boulot, mais :
1. Ça parle du XIXème, donc l'actualiser est pas forcément évident
2. Foucault s'intéresse au champ scientifique (psychiatrie, médecine en particulier), moi je préférerais savoir ce que c'est que la sexualité dans la vie quotidienne
3. En fait plutôt que les discours sur la sexualité, j'aimerais savoir comment les gentes s'assurent matériellement qu'ielles "font du sexe"
Du coup, ma vraie nouvelle question c'est de savoir quelles sont les dispositifs matériels qui permettent de délimiter "la sexualité". Et mon hypothèse, c'est que ce ne sont pas du tout des dispositifs du type "activité pratiquée" ou "endroit où on le fait", mais plutôt un mélange de "avec qui on le fait" et de "comment on choisit les gentes avec qui on le fait", ces deux éléments s'insérant dans une séquence qui se déroule AVANT le fait de "faire du sexe". La première idée qui me viendrait pour faire ça, c'est de faire une énorme série d'entretiens avec des gentes, mais j'ai peur que ce ne soit mon côté étudiante en sciences sociales qui parle. Et je doute vraiment que tant de gentes que ça parlent sans problème de leur sexualité, à moins d'avoir l'air suffisamment bizarre pour les décomplexer (ceci dit, être une meuf trans ça peut m'aider là dedans). Et surtout j'ai pas le temps, je maîtrise pas la méthode de l'entretien et ce n'est pas du tout le type de sujet sur lesquels je bosse.
Du coup je me contente de vous poser une question : comment vous savez que vous faites du sexe ? (Question bonus : pourquoi vous faites du sexe ?)
Ça peut paraître théorique comme projet et comme questionnement, en même temps je ne peux pas vraiment m'empêcher de remarquer que c'est le genre de mot qu'on utilise en permanence dans le monde féministe (pour parler de violences sexuelles, de sexualité libre etc.) et autant chez les "pro-sexe" que chez les tradies et abos, mais sans jamais le remettre en question pour savoir ce qu'il veut dire, et quels effets ont reconduit en l'utilisant, et comment ce concept nous amène à défendre telle ou telle option éthico-politique. Accessoirement, il y a des chances qu'en se demandant ce que c'est que faire du sexe pour chacunE d'entre nous et pourquoi on en fait, on retombe étonnamment sur les positions de pouvoir qui jouent dans le bouzin, et que peut-être on pourra un peu voir à qui ça sert (de la même façon qu'étudier les dispositifs qui définissent le travail sert à savoir à qui le travail sert).
Ma thèse sur la question : la sexualité est une forme-fétiche au même titre que le travail dans les sociétés capitalistes. Je veux dire par là que le travail au sens capitaliste n'est jamais défini par le type d'activité qu'il suppose mais par des dispositifs matériels qui lui sont extérieurs et des conventions arbitraires (si je fais un café quand je suis serveuse dans un bar c'est du travail, si je fais du café chez moi ce n'en est pas ; pourtant c'est le même café, les mêmes gestes etc), et dont le but est d'extorquer de la valeur au profit des propriétaires des moyens de production. De façon a priori contre-intuitive, la sexualité fonctionne exactement pareil : quand unE médecinE regarde te touche la chatte ou la bite, te fais un toucher rectal, c'est pas de la sexualité, et pourtant c'est ce type d'activité que les gens ont tendance à appeler sexuelle. Inversement, quand on a des pratiques BDSM, bah on fait un tas de trucs que des gentes font tous les jours sans considérer ça comme sexuel (genre les flics, les médecins pour les exemples les plus visuels, mais c'est vraiment pour frapper l'imagination), ou bien qu'il est difficile à première vue de considérer comme sexuel (une connaissance pute m'a raconté l'autre jour qu'un client lui proposait plusieurs centaines d'euros pour marcher sur des coquilles d'escargot devant lui (et c'est tout)). Du coup j'aimerais bien savoir ce qui nous permet de dire qu'on "fait du sexe".
Comme je suis féministe, l'hypothèse que je formule aussitôt, c'est que les définitions de la sexualité que l'on donne sans réfléchir sont fondamentalement misogynes, homophobes et âgistes (bon ça c'est plus l'expérience que la théorie qui me fait parler : il m'a fallu des années pour me rendre compte que j'ai baisé beaucoup plus tôt que je ne le croyais). C'est pas super original comme théorie jusque là, et c'est un peu obvious, donc en fait c'est pas du tout ça que j'aimerais tester. Foucault a fait dnas le tome 1 d'Histoire de la sexualité un super gros travail sur la constitution de l'objet sexualité dans le champ scientifique au XIXème. C'est super intéressant comme boulot, mais :
1. Ça parle du XIXème, donc l'actualiser est pas forcément évident
2. Foucault s'intéresse au champ scientifique (psychiatrie, médecine en particulier), moi je préférerais savoir ce que c'est que la sexualité dans la vie quotidienne
3. En fait plutôt que les discours sur la sexualité, j'aimerais savoir comment les gentes s'assurent matériellement qu'ielles "font du sexe"
Du coup, ma vraie nouvelle question c'est de savoir quelles sont les dispositifs matériels qui permettent de délimiter "la sexualité". Et mon hypothèse, c'est que ce ne sont pas du tout des dispositifs du type "activité pratiquée" ou "endroit où on le fait", mais plutôt un mélange de "avec qui on le fait" et de "comment on choisit les gentes avec qui on le fait", ces deux éléments s'insérant dans une séquence qui se déroule AVANT le fait de "faire du sexe". La première idée qui me viendrait pour faire ça, c'est de faire une énorme série d'entretiens avec des gentes, mais j'ai peur que ce ne soit mon côté étudiante en sciences sociales qui parle. Et je doute vraiment que tant de gentes que ça parlent sans problème de leur sexualité, à moins d'avoir l'air suffisamment bizarre pour les décomplexer (ceci dit, être une meuf trans ça peut m'aider là dedans). Et surtout j'ai pas le temps, je maîtrise pas la méthode de l'entretien et ce n'est pas du tout le type de sujet sur lesquels je bosse.
Du coup je me contente de vous poser une question : comment vous savez que vous faites du sexe ? (Question bonus : pourquoi vous faites du sexe ?)
Ça peut paraître théorique comme projet et comme questionnement, en même temps je ne peux pas vraiment m'empêcher de remarquer que c'est le genre de mot qu'on utilise en permanence dans le monde féministe (pour parler de violences sexuelles, de sexualité libre etc.) et autant chez les "pro-sexe" que chez les tradies et abos, mais sans jamais le remettre en question pour savoir ce qu'il veut dire, et quels effets ont reconduit en l'utilisant, et comment ce concept nous amène à défendre telle ou telle option éthico-politique. Accessoirement, il y a des chances qu'en se demandant ce que c'est que faire du sexe pour chacunE d'entre nous et pourquoi on en fait, on retombe étonnamment sur les positions de pouvoir qui jouent dans le bouzin, et que peut-être on pourra un peu voir à qui ça sert (de la même façon qu'étudier les dispositifs qui définissent le travail sert à savoir à qui le travail sert).
- cleindoAncien⋅ne
- Messages : 2926
Date d'inscription : 20/01/2012
Re: Critique de la catégorie "sexualité"
17.07.12 13:52
je pense pas être très représentative, alors je te donne ma réponse pour ce qu'elle vaut hein, que j'avais plus largement abord dans le topic "la sexualité pourquoi faire"
Quand mon altérité avec l'autre crée une énergie plus grande qu'elle n'en consomme et fusionne avec celle de l'autre, ce que je peux traduire aussi par quand l'altérité mène à l'unicité et réciproquement.comment vous savez que vous faites du sexe ?
- LuchaAncien⋅ne
- Messages : 809
Date d'inscription : 18/12/2011
Re: Critique de la catégorie "sexualité"
17.07.12 17:19
Je me sens très proche de ta façon de voir les choses, Antisexisme.
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