La prostitution n'est pas un métier
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Re: La prostitution n'est pas un métier
22.05.13 14:49
Antisexisme a écrit:Je ne pense pas qu'on doive refuser aux opprimé-e-s leur choix individuels, même si on juge qu'ils résultent d'une aliénation.Mais est-ce qu'en avoir une analyse politique légitime le fait de refuser les choix et les goûts individuels ?
Par contre, je pense qu'il est tout à fait légitime de refuser aux oppresseurs d'effectuer certains choix... notamment quand ils mènent à des conséquences extrêmement dramatiques, comme la traite, à des syndromes post-traumatiques, etc.
Et tu n'as pas l'impression que dire à une femme "je ne t'empêche pas de te prostituer mais j'empêche toute personne d'être ton client" c'est un peu de l'hypocrisie ?
- InvitéInvité
Re: La prostitution n'est pas un métier
22.05.13 14:57
Y a quelque chose d'a priori incompréhensible à se dire Féministe tout en défendant des pratiques qui nuisent aux femmes dans leur ensemble. Tout ça au nom de la liberté de choix, qui me semble quand même pas mal ressembler à l'alibi du refus de la déconstruction personnelle (on demande sans cesse à tout le monde de déconstruire, en particulier les hommes, mais s'agissant des "Féministes" pratiquant le SM ou la prostitution, d'un coup ça bloque). A ce compte-là, n'importe quoi est potentiellement Féministe, ce qui vide le terme de sa substance ; le Féminisme n'est même plus une question d'actes ou de discours, mais simplement d'état d'esprit. "Je suis Féministe parce que je l'ai décidé et peu importe ce que je dis/fais. Et si les macho-masculinistes s'appuient sur mon discours, spadmafot".
- JezebelAncien⋅ne
- Messages : 2182
Date d'inscription : 18/07/2012
Re: La prostitution n'est pas un métier
22.05.13 14:57
Lila78 a écrit:
@ Jezebel. Si on suit ton raisonnement jusqu'au bout, qu'est-ce que tu suggères ? Que chaque femme, individuellement, renonce à ses choix propres pour des raisons politiques ? Ou d'interdire certaines pratiques car allant contre l'ensemble de la classe femme ?
Absolument, je suis pour une dictature féministe où chaque femme se comporterait de façon exemplaire de façon à ne pas entacher l'image des autres femmes et ce par solidarité féminine.
Non, ce que je veux dire c'est qu'il faut dépasser l'idéologie du "c'est mon choix" donc ma démarche est valide" qui comme le disait A.S. occulte complètement l'analyse politique des rapports de pouvoir, de ce qui constituee réellement un choix, ect. Et surtout, encore une fois, arrêter de penser que nos actions ne s'arrêtent qu'à nous, sont décontextualisées.
- ArtémiseBleu⋅e
- Messages : 35
Date d'inscription : 20/05/2013
Re: La prostitution n'est pas un métier
22.05.13 15:25
Antisexisme a écrit:
En fait, je crois que la liberté ne vaut rien sans justice sociale. Si on promeut la liberté, alors que demeure un injustice sociale, on promeut ne fait la liberté du plus fort. En promouvant la liberté se prostituer, je crois qu'on promeut surtout la liberté des plus forts, à savoir, celles des clients...
Oui, la fameuse "liberté du renard libre dans le poulailler libre". Après tout les cocottes peuvent bien se défendre toute seules ou se sauver hein, et oppresser le prédateur c'est tellement injuste...
Re: La prostitution n'est pas un métier
22.05.13 15:30
Je ne sais pas si c'est à moi que tu répondais, mais je ne vois pas où j'ai "défendu des pratiques qui nuisent aux femmes dans leur ensemble".Van Poppel a écrit:Y a quelque chose d'a priori incompréhensible à se dire Féministe tout en défendant des pratiques qui nuisent aux femmes dans leur ensemble. Tout ça au nom de la liberté de choix, qui me semble quand même pas mal ressembler à l'alibi du refus de la déconstruction personnelle (on demande sans cesse à tout le monde de déconstruire, en particulier les hommes, mais s'agissant des "Féministes" pratiquant le SM ou la prostitution, d'un coup ça bloque). A ce compte-là, n'importe quoi est potentiellement Féministe, ce qui vide le terme de sa substance ; le Féminisme n'est même plus une question d'actes ou de discours, mais simplement d'état d'esprit. "Je suis Féministe parce que je l'ai décidé et peu importe ce que je dis/fais. Et si les macho-masculinistes s'appuient sur mon discours, spadmafot".
Et j'ai un peu du mal avec la seconde partie de ton message qui sonne un peu à mes oreilles comme l'attribution de brevet de féminisme.
Je suis assez d'accord avec toi, mais je trouve que justement, trouver l'équilibre entre choix personnel et prise en compte des conséquences de nos actions particulièrement compliqué. Mais c'est un peu HS, j'avais lancé un sujet ici : https://feminisme.1fr1.net/t935-l-engagement-feministe-au-quotidienJezebel a écrit:Lila78 a écrit:
@ Jezebel. Si on suit ton raisonnement jusqu'au bout, qu'est-ce que tu suggères ? Que chaque femme, individuellement, renonce à ses choix propres pour des raisons politiques ? Ou d'interdire certaines pratiques car allant contre l'ensemble de la classe femme ?
Absolument, je suis pour une dictature féministe où chaque femme se comporterait de façon exemplaire de façon à ne pas entacher l'image des autres femmes et ce par solidarité féminine.
Non, ce que je veux dire c'est qu'il faut dépasser l'idéologie du "c'est mon choix" donc ma démarche est valide" qui comme le disait A.S. occulte complètement l'analyse politique des rapports de pouvoir, de ce qui constituee réellement un choix, ect. Et surtout, encore une fois, arrêter de penser que nos actions ne s'arrêtent qu'à nous, sont décontextualisées.
Et je trouverais ça parfois un peu facile (je parle en général, pas de toi en particulier) de faire des analyses politiques et de dire à des personnes ce qu'elles devraient faire ou non quand on n'est pas directement concernée. Par exemple, je trouve que porter le voile ou faire la bimbo débile à la télé sont des choix individuels qui vont contre l'intérêt des femmes en général, mais n'étant pas confrontée personnellement à ces choix, je me sens autorisée à essayer d'expliquer pourquoi ils me posent problème, mais pas à remettre en cause les choix personnels de celles qui ont pris cette décision.
Honnêtement, en ce qui concerne la prosititution, c'est plus compliqué à mes yeux, parce que j'aurais tendance à raisonner de la même manière mais je sais aussi que ce modèle de raisonnement conduit au mieux à une évolution très lente et que pendant ce temps cela entraine des dégats considérables pour l'immense majorité des personnes prostituées.
Antisexisme a écrit:Et tu n'as pas l'impression que dire à une femme "je ne t'empêche pas de te prostituer mais j'empêche toute personne d'être ton client" c'est un peu de l'hypocrisie ?
Ben, ... non
Je sais bien que pénaliser le client risque de diminuer la possibilité des femmes de se prostituer.
En même temps, je t'avoue que j'ai vraiment du mal avec le "choix de se prostituer" Dans ma tête, ça sonne comme "avoir le choix de rester avec un mari violent", "avoir le choix d'être esclave"...
Dans mon esprit, c'est comme si on me disait : "ouais, mais le SMIC, tu crois pas que ça empêche le choix des employés à travailler pour un faible salaire ?". Le SMIC n'entrave pas la liberté des salariés, ça sert surtout à les protéger. Il entrave par contre la liberté des patrons à exploiter leurs employés.
Idem pour l'abolition de la prostitution. Je ne la vois pas comme une entrave à la liberté des femme, mais comme une entrave à la liberté des clients à utiliser sexuellement des femmes et des hommes vulnérables. Je pense que ça permet de protéger au contraire ces personnes vulnérables.
En fait, je crois que la liberté ne vaut rien sans justice sociale. Si on promeut la liberté, alors que demeure un injustice sociale, on promeut ne fait la liberté du plus fort. En promouvant la liberté se prostituer, je crois qu'on promeut surtout la liberté des plus forts, à savoir, celles des clients...
Alors pour répondre à la première partie de ta réponse sur le "choix de se prostituer"... La seule personne que je connais personnellement qui s'est prostituée, c'était un choix libre de sa part, elle n'en garde pas de regrets, de séquelle ou de souffrance. Je n'en tire aucune conclusion générale, en dehors du fait que PARFOIS ça peut être un choix.
Je trouve ça bizarre que tu utilises la comparaison avec le SMIC, parce que justement pour moi ça me semble relever de la règlementation et pas de l'abolitionnisme : j'organise les conditions et je fixe des règles (ici, un salaire minimum) pour que le travail salarié puisse s'organiser. Pour moi, "je ne t'empêche pas de te prostituer mais j'empêche toute personne d'être ton client", serait, si on le transpose dans le monde du travail (non que je considère la prostitution comme un métier mais parce que tu as utilisé une comparaison avec le monde du travail et que je trouve plus simple de me placer dans le même registre) comme "tu peux ouvrir un magasin dans ce secteur mais personne n'aura le droit de t'y acheter quelque chose".
- InvitéInvité
Re: La prostitution n'est pas un métier
22.05.13 15:38
Bon alors, si la prostitution n'est pas intrinsèquement une pratique d'oppression des femmes, si on peut être Féministe et prostituée, le corollaire c'est qu'on peut être client ET Féministe (puisque paraît-il la prostitution n'est pas une oppression sous certaines conditions).
Re: La prostitution n'est pas un métier
22.05.13 15:46
A peu près toutes les femmes ont un jour eu droit en rue au fameux "c'est combien ?"
Je trouve ça d'une violence extrême et si cette phrase est prononcée par des hommes, c'est à cause du système prostitueur. Dans un pays abolitionniste, cette phrase n'aurait plus de raison d'être.
Donc, le "libre choix" invoqué par le Strass a un impact sur toutes les autres femmes.
Il me semble que cet argument est suffisamment éloquent pour qu'on réfléchisse avant de dire "cela ne concerne que moi". C'est faux, toutes les femmes sont susceptibles d'être approchées par des punters, voir des proxénètes. Si la Suède n'est pas une réussite totale, que dire des Pays-Bas ou de l'Allemagne ou la traite a explosé ?
Comment être assez naïf/naïve pour croire que la prostitution "libre et réglementée" ne va pas attirer automatiquement les mafias et les proxénètes qui sont à l'affût dès que des sommes d'argent énormes circulent ? Donc le "vaudrait mieux s'en prendre aux réseaux", c'est du pipeau, ça n'a jamais marché. Il FAUT pénaliser les punters pour que TOUTES les femmes soient débarrassées de cette épée de Damoclès du "c'est combien ?" et aussi, arrêter de faire venir des femmes de tous les pays en leur faisant miroiter de l'argent facile, alors qu'elles tomberont presque automatiquement dans les filets de mafias.
Je trouve ça d'une violence extrême et si cette phrase est prononcée par des hommes, c'est à cause du système prostitueur. Dans un pays abolitionniste, cette phrase n'aurait plus de raison d'être.
Donc, le "libre choix" invoqué par le Strass a un impact sur toutes les autres femmes.
Il me semble que cet argument est suffisamment éloquent pour qu'on réfléchisse avant de dire "cela ne concerne que moi". C'est faux, toutes les femmes sont susceptibles d'être approchées par des punters, voir des proxénètes. Si la Suède n'est pas une réussite totale, que dire des Pays-Bas ou de l'Allemagne ou la traite a explosé ?
Comment être assez naïf/naïve pour croire que la prostitution "libre et réglementée" ne va pas attirer automatiquement les mafias et les proxénètes qui sont à l'affût dès que des sommes d'argent énormes circulent ? Donc le "vaudrait mieux s'en prendre aux réseaux", c'est du pipeau, ça n'a jamais marché. Il FAUT pénaliser les punters pour que TOUTES les femmes soient débarrassées de cette épée de Damoclès du "c'est combien ?" et aussi, arrêter de faire venir des femmes de tous les pays en leur faisant miroiter de l'argent facile, alors qu'elles tomberont presque automatiquement dans les filets de mafias.
Re: La prostitution n'est pas un métier
22.05.13 16:41
Ça arrive aussi dans des rues où les prostituées ne sont pas habituellement, c’est ça le pire.
Des hommes voyant une femme debout au bord d’un trottoir s’imaginent qu’elle tapine alors qu’elle attend simplement qqn, je trouve que c’est une situation anormale et la réglementation ne fera qu’aggraver cette situation.
Des hommes voyant une femme debout au bord d’un trottoir s’imaginent qu’elle tapine alors qu’elle attend simplement qqn, je trouve que c’est une situation anormale et la réglementation ne fera qu’aggraver cette situation.
- AraignéeAncien⋅ne
- Messages : 4550
Date d'inscription : 02/09/2012
Re: La prostitution n'est pas un métier
22.05.13 18:11
@LuxLisbon
L'exemple de la Suède est moins un échec que l'exemple des pays réglementaristes (Pays-Bas, Allemagne...) où le nombre d'esclaves sexuel(le)s a explosé. On offre aux proxénètes des pays où la prostitution est favorisée, ils ne se privent pas d'y amener leur esclaves, en grand nombre. Ils peuvent librement les installer dans des maisons closes, ou dans la rue, et empocher la monnaie...
Sinon, encore une fois, il ne s'agit pas d'interdire de se prostituer, mais d'interdire aux proxénètes et aux clients de profiter de cette vulnérabilité.
Là où je te rejoins, c'est dans le fait qu'il faut lutter activement pour la protection et l'aide aux victimes d'abus sexuels, pour abolir ces abus sexuels, pour la disparition de la culture du viol, où on considère que le corps des femmes est à disposition des hommes. Seulement, je crois que normaliser la prostitution participe de cette culture, avec l'idée que les hommes auraient des besoins sexuels irréfrénables, qu'ils devraient pouvoir satisfaire à tout prix (en payant, ou en violant). Envoyer le message que non, le consentement sexuel n'est pas négociable ni achetable, c'est aussi lutter contre la culture du viol.
Et non, se prostituer, ce n'est pas mal, que ce soit par besoin d'argent, par plaisir, par pulsion auto-destructrice, ce n'est pas mal (et lutter contre la stigmatisation des prostituées, c'est aussi une chose urgente à mettre en place). Ce qui, par contre, est mal, à mon sens, c'est de filer 50 ou 500 euros pour baiser quelqu'un sans se soucier de pourquoi cette personne est-elle prête à se faire baiser pour un billet. Et même si le client s'en soucie, il n'a de toute façon aucun moyen de savoir, parce que jamais une pute ne lui dira "j'ai un proxénète", ou "tu sais qu'en me payant, tu m'aides à me détruire ?"
Ta comparaison avec Sabina Spielrein dans A Dangerous Method a un biais non négligeable. Elle aime se faire fesser. Perso, et je suis loin d'être la seule, de plaisir dans la prostitution, je n'en ai jamais pris. Du dégoût, de la douleur, du désespoir, jusqu'à un point inimaginable, oui, mais de plaisir... jamais. Et quand bien même, la prostitution n'est pas, contrairement au BDSM, une simple question de sexualité ; parce qu'il y a une dimension économique qui ne peut pas être reléguée au second plan (s'il n'y a pas d'argent en jeu, ce n'est pas de la prostitution).
Il est vrai que l'abolition de la prostitution ne la fera pas disparaître, tout comme l'abolition de l'esclavage ne l'a pas fait disparaître non plus. Néanmoins, l'esclavage n'étant plus institutionnalisé, étant devenu illégal, plus personne ne le voit comme quelque chose allant de soi, et les victimes sont reconnues comme victimes (même les esclaves, et ils existent, qui ne se voient pas comme des victimes). De plus, le nombre d'esclaves a fortement baissé.
Interdire le meurtre ne l'a pas non plus totalement aboli, ce n'est pas pour autant qu'on remet en question cette interdiction...
Là où je te rejoins aussi, c'est sur la pénalisation du racolage, qui était une honte (me semble que ça a été aboli, ou du moins c'est en cours). Pour moi, les prostituées, dans leur ensemble (bien que je reconnaisse l'existence d'exceptions), sont des victimes. Il faut donc protéger ces victimes, et faire en sorte qu'elles soient vues non comme des délinquantes (ce qu'engendrait le délit de racolage), mais comme des victimes. Il faut aussi, en effet, aider les prostituées qui le souhaitent à sortir de la prostitution.
A part ça, merci pour ton respect vis à vis de mon vécu (je tiens à te remercier, parce que ce respect, je ne l'ai pas toujours eu).
L'exemple de la Suède est moins un échec que l'exemple des pays réglementaristes (Pays-Bas, Allemagne...) où le nombre d'esclaves sexuel(le)s a explosé. On offre aux proxénètes des pays où la prostitution est favorisée, ils ne se privent pas d'y amener leur esclaves, en grand nombre. Ils peuvent librement les installer dans des maisons closes, ou dans la rue, et empocher la monnaie...
Sinon, encore une fois, il ne s'agit pas d'interdire de se prostituer, mais d'interdire aux proxénètes et aux clients de profiter de cette vulnérabilité.
Là où je te rejoins, c'est dans le fait qu'il faut lutter activement pour la protection et l'aide aux victimes d'abus sexuels, pour abolir ces abus sexuels, pour la disparition de la culture du viol, où on considère que le corps des femmes est à disposition des hommes. Seulement, je crois que normaliser la prostitution participe de cette culture, avec l'idée que les hommes auraient des besoins sexuels irréfrénables, qu'ils devraient pouvoir satisfaire à tout prix (en payant, ou en violant). Envoyer le message que non, le consentement sexuel n'est pas négociable ni achetable, c'est aussi lutter contre la culture du viol.
Et non, se prostituer, ce n'est pas mal, que ce soit par besoin d'argent, par plaisir, par pulsion auto-destructrice, ce n'est pas mal (et lutter contre la stigmatisation des prostituées, c'est aussi une chose urgente à mettre en place). Ce qui, par contre, est mal, à mon sens, c'est de filer 50 ou 500 euros pour baiser quelqu'un sans se soucier de pourquoi cette personne est-elle prête à se faire baiser pour un billet. Et même si le client s'en soucie, il n'a de toute façon aucun moyen de savoir, parce que jamais une pute ne lui dira "j'ai un proxénète", ou "tu sais qu'en me payant, tu m'aides à me détruire ?"
Ta comparaison avec Sabina Spielrein dans A Dangerous Method a un biais non négligeable. Elle aime se faire fesser. Perso, et je suis loin d'être la seule, de plaisir dans la prostitution, je n'en ai jamais pris. Du dégoût, de la douleur, du désespoir, jusqu'à un point inimaginable, oui, mais de plaisir... jamais. Et quand bien même, la prostitution n'est pas, contrairement au BDSM, une simple question de sexualité ; parce qu'il y a une dimension économique qui ne peut pas être reléguée au second plan (s'il n'y a pas d'argent en jeu, ce n'est pas de la prostitution).
Il est vrai que l'abolition de la prostitution ne la fera pas disparaître, tout comme l'abolition de l'esclavage ne l'a pas fait disparaître non plus. Néanmoins, l'esclavage n'étant plus institutionnalisé, étant devenu illégal, plus personne ne le voit comme quelque chose allant de soi, et les victimes sont reconnues comme victimes (même les esclaves, et ils existent, qui ne se voient pas comme des victimes). De plus, le nombre d'esclaves a fortement baissé.
Interdire le meurtre ne l'a pas non plus totalement aboli, ce n'est pas pour autant qu'on remet en question cette interdiction...
Là où je te rejoins aussi, c'est sur la pénalisation du racolage, qui était une honte (me semble que ça a été aboli, ou du moins c'est en cours). Pour moi, les prostituées, dans leur ensemble (bien que je reconnaisse l'existence d'exceptions), sont des victimes. Il faut donc protéger ces victimes, et faire en sorte qu'elles soient vues non comme des délinquantes (ce qu'engendrait le délit de racolage), mais comme des victimes. Il faut aussi, en effet, aider les prostituées qui le souhaitent à sortir de la prostitution.
A part ça, merci pour ton respect vis à vis de mon vécu (je tiens à te remercier, parce que ce respect, je ne l'ai pas toujours eu).
Je plussoie fortement.Antisexisme a écrit:
Je précise aussi que quand une personne se lance dans la prostitution, elle n'a aucun moyen de savoir si elle fera partie des... 5% (je pense être généreuse) à ne pas en ressentir les effets négatifs. Les clients, eux, n'ont aucun moyen de savoir ce qu'il en est, et s'en fichent souvent.
Ca me rappelle un peu la discussion sur le viol, qu'on a eu il y a peu. Quelques personnes ne sont pas traumatisées par le viol. Pourtant violer est un acte grave, car tu as de fortes chances de durablement blesser psychiquement ta victime. On ne fait pas de distinction entre le "bon" et le "mauvais" viol. Je trouve que c'est idem pour la prostitution : en payant quelqu'un pour du sexe, un client a de forte chance de contribuer a sa destruction. On devrait le pénaliser.
Re: La prostitution n'est pas un métier
22.05.13 18:29
C'est la difficulté de la chose.Antisexisme a écrit:@Lila78 :
Je te crois absolument pour ta copine, mais je trouve qu'on en revient toujours au cas individuel.
Tu dis "le choix libre n'existe pas" je te dis "je pense que c'est très rare mais ça existe puisque je connais quelqu'un dans ce cas" et tu me dis "tu en reviens au cas individuel"
D'où le retour à ma question de départ.
Est-ce qu'on doit limiter les choix individuels puisque l'analyse globale montre que c'est mauvais dans la grande majorité des cas (même si pas dans 100% des cas) ?
J'ai bien compris où tu voulais en venir sur l'idée de limiter la liberté de l'oppresseur, j'ai juste trouvé la comparaison mal choisie puisque pour moi elle renvoie d'avantage à l'idée de règlementation qu'à l'idée d'abolition.Antisexisme a écrit:Je pense que tu as mal compris le sens de ma comparaison (c'est peut-être moi qui n'ai pas été claire). Je voulais souligner que la prostitution n'est pas le seul cas où, en cherchant à limiter en premier lieu la liberté de l'oppresseur, on limite la "liberté"* de l'opprimé-e, en cherchant à le protéger.
Dans la législation, on interdit aux gens d'avoirs des esclaves, ou à employer quelqu'un pour un salaire trop faible, ou encore, à utiliser les organes d'autrui. Certaines personnes (des libertariens, en général...) te rétorqueront, qu'on va alors contre la liberté des gens à travailler gratuitement (=être esclaves) ou pour un petit salaire, ou à vendre leurs organes. En gros : que tu limites la liberté des faibles. Alors qu'en réalité, on cherche surtout à limiter la liberté des puissants.
Je trouve qu'on se retrouve dans la même situation dans le débat pour la prostitution.
Mais ce qui me gêne la dedans c'est plus la forme que le fond.
Reprenons l'exemple de l'esclavage. Je trouverais assez hypocrite de dire "tu as le droit d'être esclave, c'est juste que personne n'a le droit d'être ton propriétaire".
Disons que pour moi c'est vraiment jouer avec les mots et pas admettre ouvertement le fond des choses. ("tu n'as pas le droit d'être esclave, mais si c'était le cas, on estime que c'est le propriétaire qui est en tort et que c'est lui qui doit être puni").
Euh non le corollaire n'est pas valable.Van Poppel a écrit:Bon alors, si la prostitution n'est pas intrinsèquement une pratique d'oppression des femmes, si on peut être Féministe et prostituée, le corollaire c'est qu'on peut être client ET Féministe (puisque paraît-il la prostitution n'est pas une oppression sous certaines conditions).
EDIT : je tiens quand même à préciser que je ne soulève que les points qui me posent problème et que la plupart des arguments développés ici par les abolitionnistes me semblent parfaitement pertinents.
- InvitéInvité
Re: La prostitution n'est pas un métier
22.05.13 19:04
Mais pourquoi qu'il est pas valable ? Prostituées réglementaristes et prostitueurs alimentent tous deux un système qui oppresse les femmes. Pourquoi les premières peuvent-elles se prétendre Féministes et pas les seconds ?
Sinon, l'histoire des "brevets de Féminisme" me fatigue un peu. Faut-il être femme et se prétendre Féministe pour l'être véritablement ? Marcella Iacub se prétend Féministe, faudrait donc s'interdire de lui objecter que c'est pas le cas ? A ce compte-là, le Féminisme ne serait pas une histoire de discours ni d'actes, mais de ressenti personnel et d'état d'esprit. Autrement dit, n'importe qui et surtout n'importe quoi pourrait être caractérisé comme Féministe. Ou comment vider le concept de sa substance.
Sinon, l'histoire des "brevets de Féminisme" me fatigue un peu. Faut-il être femme et se prétendre Féministe pour l'être véritablement ? Marcella Iacub se prétend Féministe, faudrait donc s'interdire de lui objecter que c'est pas le cas ? A ce compte-là, le Féminisme ne serait pas une histoire de discours ni d'actes, mais de ressenti personnel et d'état d'esprit. Autrement dit, n'importe qui et surtout n'importe quoi pourrait être caractérisé comme Féministe. Ou comment vider le concept de sa substance.
Re: La prostitution n'est pas un métier
22.05.13 19:15
cleindo a écrit:Je continuerai sur un autre il si je trouve la motivation. Ca n'enlève rien à ma remarque sur ta façon de t'exprimer alors que moi j'ai parlé d'expérience perso.
j'ai la flemme de tout relire mais j'ai du mal m'exprimer à un moment donné, donc désolée.
a moins que de par ton expérience tu validais l'idée de service public sexuel mais franchement je pense que ce n'est pas du tout la même chose, c'est ce que j'ai maladroitement essayé d'exprimer.
@LuxLisbon j'aimerais bien te poser quelques questions:
Comment comptes-tu t'y prendre pour défendre le droit des femmes à se prostituer sans défendre le droit des hommes à disposer de l'accès au corps des femmes dès qu'ils en ont envie (moyennant finance)? Tu ne crois pas que c'est deux façons différentes de défendre la même chose?
Tu ne crois pas que le droit de se prostituer se transforme très vite en un devoir de se prostituer, et donc en une dépossession de son corps? Est-ce que vendre un service sexuel c'est vraiment la liberté sexuelle? Est-ce que justement la liberté sexuelle ne devrait pas s'exercer hors de toute contrainte, y compris matérielle?
Moi la liberté de faire ce qu'on veut de son corps, y compris le vendre, j'suis très pour, hein. Le problème c'est la liberté de faire ce qu'on veut du corps des autres, y compris l'acheter. Là ça sonne plus pareil. Et le client de prostituée ne sait jamais, jamais ce qu'il achète, et même s'il s'en soucie (ce qui je pense est rarement le cas) il ne peut pas le savoir, ce qui fait de son acte d'achat de service sexuel un acte de violence. Quand tu frappes, c'est un acte de violence même si des fois tu ne fais pas mal.
Sinon j'ai écrit 2 articles qui rejoignent le sujet:
http://lesquestionscomposent.fr/putesainte/
et surtout:
http://lesquestionscomposent.fr/le-client-est-roi/
Re: La prostitution n'est pas un métier
22.05.13 19:44
@ Van Poppel
Si pour se dire féministe il ne faut d'aucune manière "alimenter un système qui oppresse les femmes", PERSONNE ne peut se dire féministe. Tout le monde y contribue.
Pourquoi le corollaire n'est pas valable ?
Parce qu'une femme qui a cherché à déconstruire les choses sait si son choix est contraint ou non, ce qui lui permet dans les deux cas de se dire féministe, dans le premier cas parce que son choix est libre et qu'elle peut donc chercher à "définir, promouvoir et établir les droits des femmes dans la société civile et dans la sphère privée", dans le second parce qu'elle n'a malheureusement pas le choix, alors qu'un client ne pourrait être féministe que s'il pouvait être CERTAIN que le choix de la prostituée est libre et qu'elle ne ressentira aucun effet négatif suite à cette relation sexuelle ce qui, comme le souligent Antisexisme Araignée ou l'elfe, est impossible.
Ensuite, concernant les brevets de féminismes je me permettrais tout à fait de dire que JE PENSE QUE tel ou tel ARGUMENT ou IDEE n'est pas féministe mais je n'objecterai pas que quelqu'un qui se dit féministe ne l'est pas car je ne prétends pas avoir la science infuse (ni en ce qui concerne l'ensemble des pensées de la personne, si en ce qui concerne les sujets polémiques du féminisme). E je me permettrais encore moins de le faire si j'étais un homme. Tout comme en tant que femme blanche, je peux me permettre de dire ce que je pense de tel ou tel argument ou idée antiraciste, mais je ne me permettrais pas d'affirmer qu'une personne racisée qui dit lutter contre le racisme n'est pas antiraciste, même si je trouve que ces arguments ne sont pas valables.
Si pour se dire féministe il ne faut d'aucune manière "alimenter un système qui oppresse les femmes", PERSONNE ne peut se dire féministe. Tout le monde y contribue.
Pourquoi le corollaire n'est pas valable ?
Parce qu'une femme qui a cherché à déconstruire les choses sait si son choix est contraint ou non, ce qui lui permet dans les deux cas de se dire féministe, dans le premier cas parce que son choix est libre et qu'elle peut donc chercher à "définir, promouvoir et établir les droits des femmes dans la société civile et dans la sphère privée", dans le second parce qu'elle n'a malheureusement pas le choix, alors qu'un client ne pourrait être féministe que s'il pouvait être CERTAIN que le choix de la prostituée est libre et qu'elle ne ressentira aucun effet négatif suite à cette relation sexuelle ce qui, comme le souligent Antisexisme Araignée ou l'elfe, est impossible.
Ensuite, concernant les brevets de féminismes je me permettrais tout à fait de dire que JE PENSE QUE tel ou tel ARGUMENT ou IDEE n'est pas féministe mais je n'objecterai pas que quelqu'un qui se dit féministe ne l'est pas car je ne prétends pas avoir la science infuse (ni en ce qui concerne l'ensemble des pensées de la personne, si en ce qui concerne les sujets polémiques du féminisme). E je me permettrais encore moins de le faire si j'étais un homme. Tout comme en tant que femme blanche, je peux me permettre de dire ce que je pense de tel ou tel argument ou idée antiraciste, mais je ne me permettrais pas d'affirmer qu'une personne racisée qui dit lutter contre le racisme n'est pas antiraciste, même si je trouve que ces arguments ne sont pas valables.
- GruntBanni·e
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Re: La prostitution n'est pas un métier
22.05.13 20:07
@Van Poppel : Tu ne devrais pas faire l'amalgame entre SM et prostitution, ça n'a rien à voir. (A part que certaines prostituées pratiquent le SM, mais toute pratique sexuelle peut se voir monnayée).
- OmniiaAncien⋅ne
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Re: La prostitution n'est pas un métier
22.05.13 20:15
@Lila78 : Je soutiens la question de Van Poppel. Si la prostitution peut être une activité non gênante à défendre, quel problème à y recourir en tant que client ?
Et puis par rapport à l'histoire de ton amie qui a été prostituée, je comprends pas très bien comment tu peux dire qu'un client ne peut jamais être certain qu'une prostituée a librement choisi cette activité alors que toi tu le pourrais.
Et puis par rapport à l'histoire de ton amie qui a été prostituée, je comprends pas très bien comment tu peux dire qu'un client ne peut jamais être certain qu'une prostituée a librement choisi cette activité alors que toi tu le pourrais.
- InvitéInvité
Re: La prostitution n'est pas un métier
22.05.13 20:15
Euh, je connais plusieurs prostituées pro-réglementarisme qui se prétendent Féministes, et dont la biographie est truffée d'évènements similaires à ceux rapportés par Artémise ou Araignée. On peut même dire qu'elles aussi collent au portrait brossé par Trinquart ou Salmona, que derrière le "choix" il y a toute une série de déterminismes traumatiques (le violeur commence le travail de réification, les clients le poursuivent). En d'autres termes, elles ont beau avoir longuement théorisé, elles ont déconstruit que dalle. On peut même affirmer (en tous cas moi je le fais malgré mon statut de porteur de roupettes qui me discrédite magiquement) que leur agressivité face aux abolos qui évoquent la genèse du "choix" est très liée à une forme de déni.
- ArtémiseBleu⋅e
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Re: La prostitution n'est pas un métier
22.05.13 20:46
pierregr a écrit:A peu près toutes les femmes ont un jour eu droit en rue au fameux "c'est combien ?"
Je trouve ça d'une violence extrême et si cette phrase est prononcée par des hommes, c'est à cause du système prostitueur. Dans un pays abolitionniste, cette phrase n'aurait plus de raison d'être.
Donc, le "libre choix" invoqué par le Strass a un impact sur toutes les autres femmes.
Il me semble que cet argument est suffisamment éloquent pour qu'on réfléchisse avant de dire "cela ne concerne que moi". C'est faux, toutes les femmes sont susceptibles d'être approchées par des punters, voir des proxénètes. Si la Suède n'est pas une réussite totale, que dire des Pays-Bas ou de l'Allemagne ou la traite a explosé ?
Comment être assez naïf/naïve pour croire que la prostitution "libre et réglementée" ne va pas attirer automatiquement les mafias et les proxénètes qui sont à l'affût dès que des sommes d'argent énormes circulent ? Donc le "vaudrait mieux s'en prendre aux réseaux", c'est du pipeau, ça n'a jamais marché. Il FAUT pénaliser les punters pour que TOUTES les femmes soient débarrassées de cette épée de Damoclès du "c'est combien ?" et aussi, arrêter de faire venir des femmes de tous les pays en leur faisant miroiter de l'argent facile, alors qu'elles tomberont presque automatiquement dans les filets de mafias.
Effectivement, je suis moi aussi convaincue que légitimer la prostitution a un réel impacte sur toutes les femmes. Et cela va jusqu’à « forcer » l’entrée en prostitution « libre » de certaines femmes.
J’aimerais illustrer mon propos avec un exemple, pioché au hasard, mais dont je suis sûre de la véracité dans le moindre détail : ma première passe. Elle s’est déroulée à l’initiative d’un homme qui, sachant que j’avais de gros problèmes financiers et que j’étais dans l’urgence (coupure edf, menace d’expulsion, etc), m’a proposé une somme d’argent en échange d’une « petite gâterie ». J’avais tout juste 21 ans et j’en paraissais 16, quant à lui, quinquagénaire aisé, il n’avait aucun moyen de vérifier mon âge (juste pour vous situer un peu le contexte). J’ai refusé en expliquant que je n’avais jamais fait « ça », pas pour de l’argent et que je ne m’en sentais pas capable, je ne voulais pas. Il a insisté, encore et encore, j’ai réitéré mon refus. Et puis il a sorti une grosse liasse de billets et me l’a tendu « prends, tu en as besoin et en échange je ne te demande pas grand-chose. C’est une belle somme, bien supérieur aux tarifs en vigueurs, réfléchis au fait que tu risques de le regretter plus tard ». Je me suis retrouvée avec ce fric dans la main, j’ai hésité, pensé à ma situation, j’ai mit les billets dans ma poche et je me suis exécutée en me disant façon leitmotiv « pourvu que ça finisse vite » (digression : les mêmes mots, exactement, que je me suis répétée en boucle dans ma tête quand j’ai été violée quelques années auparavant). Voilà, fin du début de l’histoire de ma putasserie.
Encore aujourd’hui je ne suis sûre de rien, c'est-à-dire que je ne saurai affirmer en toute honnêteté que sans ce mec je ne me serais jamais prostituée. Peut être bien, peut être pas, mais là n’est pas vraiment la question de mon propos. Ce dont je suis certaine par contre c’est que si à l’époque il avait existé une loi pénalisant les clients il y aurait eu de fortes chances pour que ce soir là, en rentrant chez moi, je ne me retrouve pas à vomir tout ce que je pouvais entre deux sanglots avant de me taillader les avant-bras à coups de lame de rasoir. Ce « client » n’était pas brutal ni insultant, c’était un de ceux que l’on dit « gentils », ceux pour qui à mon avis une simple loi, couplée à une prévention intelligente, servirait de dissuasion et de prise de conscience « il n’est pas normal de profiter de la détresse d’autrui ».
En conclusion je précise le but de ce message : il ne s’agit pas pour moi qu’on me dise « je suis désolé de ce qui t’es arrivé » surtout si cela doit précéder « mais cela ne se passe pas toujours comme ça », parce que ça, ça me donne juste mal au bide. Je SAIS que ça ne se passe pas toujours comme ça, parfois c’est « mieux », parfois c’est pire, et alors ? Et le fait d’être désolé (quand c’est sincère) c’est bon signe, c’est de l’empathie, mais ça ne règle rien si cela se limite à une parole réconfortante. Ce que je veux moi, ce pourquoi je m’exprime, c’est qu’on réfléchisse sérieusement à tout cela pour faire en sorte que ça se reproduise le moins souvent possible et pour le moins de personnes possible. Que des jeunes femmes comme celle que j’étais à l’époque soient protégées par une loi et par un réel travail sur les mentalités, elles ainsi que les autres personnes fragilisées et vulnérables, les homosexuels foutus dehors par leurs parents, les mères célibataires aux abois, les toxicomanes, les femmes âgées de 80 ans (bien souvent des prostituées sans retraite) qui font des passes en échange d’un sandwich… Parce qu’en France, même si tout n’est pas rose, on crève rarement de faim et il existe des solutions à la pauvreté (pas parfaites, je l’admet) par contre on crève facilement à petit feu pour cause d’indifférence générale à certaines souffrances qui, bien souvent, trouve son origine dans des problèmes psy causés par des traumas.
Il faut bien reconnaître néanmoins que cette souffrance et cette vulnérabilité intéressent grandement une certaine catégorie de personne : les prédateurs sexuels, (et) les « clients ». Et avec la bénédiction des discours « pro-sexe », donc d’une frange du féminisme et de la gauche, sinon ce serait moins drôle et surtout bien trop culpabilisant pour la plupart d’entre eux.
- InvitéInvité
Re: La prostitution n'est pas un métier
22.05.13 20:58
Je veux pas répondre à la place de Lila, mais à mon avis il y a quand même une grosse asymétrie : la prostituée peut savoir* pourquoi elle fait ça et ce que ça lui fait, le client non, surtout dans le contexte actuel.Omniia a écrit:@Lila78 : Je soutiens la question de Van Poppel. Si la prostitution peut être une activité non gênante à défendre, quel problème à y recourir en tant que client ?
* Après je suis conscient que ça veut pas dire qu'elle le sait toujours, mais je trouve que l'asymétrie persiste : dit autrement, la prostituée dispose de son corps, le client du corps d'un autre...
Sinon je voudrais remercier Araignée et Artémise pour leurs témoignages, qui me font pas mal réfléchir.
- OmniiaAncien⋅ne
- Messages : 2909
Date d'inscription : 20/10/2012
Re: La prostitution n'est pas un métier
22.05.13 21:28
@Numa : Si je comprends bien : un client ne peut pas savoir pourquoi et comment une prostituée fait cette activité car de toute façon personne ne peut le savoir, même pas elle-même.
Mais alors, on la fait comment la distinction ?
Et encore sur la question de se dire ou non féministe : un mec qui défend la prostitution et qui connaît une amie prostituée disant faire cette activité librement peut être considéré comme féministe, par contre si il devient un de ses "clients" il ne peut plus conserver cette appellation ?
Mais alors, on la fait comment la distinction ?
Et encore sur la question de se dire ou non féministe : un mec qui défend la prostitution et qui connaît une amie prostituée disant faire cette activité librement peut être considéré comme féministe, par contre si il devient un de ses "clients" il ne peut plus conserver cette appellation ?
Re: La prostitution n'est pas un métier
22.05.13 22:07
Même si la prostitution peut être un choix libre (ce qui pour moi ne veut pas dire "une activité non gênante à défendre"), ce n'est qu'une infime minorité des personnes qui se prostituent.Omniia a écrit:@Lila78 : Je soutiens la question de Van Poppel. Si la prostitution peut être une activité non gênante à défendre, quel problème à y recourir en tant que client ?
Et puis par rapport à l'histoire de ton amie qui a été prostituée, je comprends pas très bien comment tu peux dire qu'un client ne peut jamais être certain qu'une prostituée a librement choisi cette activité alors que toi tu le pourrais.
Pourtant, toutes les personnes qui y sont contraintes, si un client leur pose la question, diront qu'elles le font librement tout simplement car elles n'ont pas le choix (la personne qui le fait pour des raisons économiques aura besoin de manger, celle qui le fait pour s'autodétruire ne pourra s'empêcher de continuer à le faire, celle qui a un proxénète devra lui rendre des comptes, etc).
Alors que la personne dont je parlais (qui est un homme) n'avait aucune raison de me mentir. Il n'était pas forcé de m'en parler, il me connaissait suffisamment pour savoir que quoi qu'il me dise je ne l'aurais pas jugé et il avait suffisamment de recul, j'en suis persuadée, pour savoir si oui ou non il était dans le déni à l'époque.
Ah, oui, et tu peux affirmer ça parce que tu es leur psychiatre et que tu connais les tenants et les aboutissements des faits en question... Ah non en fait, tu fais juste de la psychologie de bazarVan Poppel a écrit:Euh, je connais plusieurs prostituées pro-réglementarisme qui se prétendent Féministes, et dont la biographie est truffée d'évènements similaires à ceux rapportés par Artémise ou Araignée. On peut même dire qu'elles aussi collent au portrait brossé par Trinquart ou Salmona, que derrière le "choix" il y a toute une série de déterminismes traumatiques (le violeur commence le travail de réification, les clients le poursuivent). En d'autres termes, elles ont beau avoir longuement théorisé, elles ont déconstruit que dalle. On peut même affirmer (en tous cas moi je le fais malgré mon statut de porteur de roupettes qui me discrédite magiquement) que leur agressivité face aux abolos qui évoquent la genèse du "choix" est très liée à une forme de déni.
Je ne nie absolument par les traumatisme, le déni qui peuvent exister et qui sont fréquents, mais la psychologie de bazar, et surtout le fait d'utiliser des traumatisme et des souffrances psychiques (réelles ou imaginaires) pour discréditer la parole de ceux qui n'ont pas le même avis que nous, ça me donne personnellement envie de vomir.
Je suis plutôt d'accord avec ce que tu dis, le truc c'est que philosophiquement, on ne peut pas appliquer ça à la prostitution et pas au reste. Et j'aurais peur d'une dérive liberticide. Faut encore que j'y réflechisse ^^Je pense que oui... quand on fait de la politique, on est obligé un moment d'ériger des règles de société.Lila78 a écrit:
Est-ce qu'on doit limiter les choix individuels puisque l'analyse globale montre que c'est mauvais dans la grande majorité des cas (même si pas dans 100% des cas) ?
Je pense que privilégier les choix individuels peut être vite dangereux, car on tombe dans un ultra-libéralisme qui oublie les rapports sociaux, les oppressions, etc. Et on en vient vite à favoriser une politique de "la liberté du renard libre dans un poulailler de poules libres" comme dit Artémise.
Je comprends mieux ce que tu veux dire, même si je vois pas en quoi dire "il est interdit d'être..." rend la personne responsable de la situation. Mais je suis d'accord quand tu dis qu'il est important de souligner que clients et prostitué-e-s n'ont pas un rôle identique et qu'il faut cibler le responsable. Et aussi qu'il faut clairement différencier l'abolitionnisme du prohibitionnisme. Même si je continue à trouver le fait "d'occulter" une des conséquences concrètes de la loi (le fait que certaines femmes seront empêchées de se prostituer) problématique.Je ne pense pas qu'il s'agisse d'hypocrisie, mais d'une véritable volonté de dissocier agresseur et victime.Lila78 a écrit:
Disons que pour moi c'est vraiment jouer avec les mots et pas admettre ouvertement le fond des choses. ("tu n'as pas le droit d'être esclave, mais si c'était le cas, on estime que c'est le propriétaire qui est en tort et que c'est lui qui doit être puni").
Si je dis "je veux interdire aux prostituées de se prostituer", j'aurais l'impression que je suis en train de dire que je considère qu'elles font quelque chose de mal. Je trouve que cette formulation élude complètement les responsables de la prostitution, ceux qui à mon sens, ont vraiment le choix : proxénètes et clients.
Même quand je lis "il est interdit d'être esclave"... je trouve qu'on dirait que l'esclave est responsable de sa situation. Ou même lire "il est interdit d'être exploité", voire "il est interdit d'être violé-e" (ça peut paraître bizarre comme comparaison, mais je pense que ça l'est pas tant que ça, surtout vu le nombre d'esclaves sexuelles).
Pour moi, c'est vraiment important de souligner que clients et prostitué-e-s n'ont pas un rôle identique là-dedans... et que j'ai envie de cibler le responsable.
Par contre j'admets que favoriser une politique abolitionniste, c'est en effet empêcher par ricochet certaines femmes de se prostituer. C'est vrai.
Si je dis "la prostitution devrait interdite, et c'est le client qui devrait être sanctionné puisque c'est lui le responsable de la situation", j'ai bon ?
- InvitéInvité
Re: La prostitution n'est pas un métier
22.05.13 22:53
Oui je l'affirme car je les connais personnellement. La décence et le respect de la charte me poussent à garder pour moi ce que je fais de ta "psychologie de bazar". Si l'on va par là, tout le monde fait de la "psychologie de bazar" ici, à tout propos (et heureusement que je n'ai pas déballé ce lieu commun argumentaire à chaque fois que j'en ai été l'objet), et c'est même plutôt sain de ne pas prendre un discours pour argent comptant et de le remettre en perspective. Mais quand ça concerne une femme, de surcroît Féministe auto-proclamée : immunité. Je t'informe en outre que tu viens de me répondre de la manière que le font les clients à putes sur Docti.
Re: La prostitution n'est pas un métier
22.05.13 23:11
Omniia a écrit:@Numa : Si je comprends bien : un client ne peut pas savoir pourquoi et comment une prostituée fait cette activité car de toute façon personne ne peut le savoir, même pas elle-même.
Mais alors, on la fait comment la distinction ?
Moi je pense que faire une distinction entre les "prostituées libres" et les autres c'est surtout une stratégie grossière des pro-prostitutions (et je ne parle pas des féministes).
Y a pas d'un côté les prostituées chic et glam et trop heureuses et libérées, et de l'autre les pauvres victimes séquestrées et violées. Non seulement chaque prostituée a une histoire personnelle qui n'appartient qu'à elle, mais en plus, chaque acte prostitutionnel pourrait être vécu très différemment par la même personne en fonction d'une multitude de facteurs…
Re: La prostitution n'est pas un métier
22.05.13 23:18
Oui, même Grisélidis Réal qui défendait la prostitution avec acharnement disait qu'elle avait failli mourir plusieurs fois à cause de clients violents, elle parlait aussi de viols.
- JezebelAncien⋅ne
- Messages : 2182
Date d'inscription : 18/07/2012
Re: La prostitution n'est pas un métier
22.05.13 23:41
Ce qui fait d'ailleurs, que je ne comprends pas vraiment comment elle pouvait le défendre avec autant d'acharnement, ni surtout que, puisque c'est connu, l'on puisse continuer à défendre cette activité sachant ce que ça peut engendrer comme violences...
- InvitéInvité
Re: La prostitution n'est pas un métier
22.05.13 23:51
Vous noterez que Griselidis Réal est une icone brandie par bon nombre de prostituées de type "Féministes pro-sexe".
http://spermufle.wordpress.com/2013/01/11/la-pute-au-grand-coeur/
J'y cite quelques extraits du discours de la Dame :
« Ils viennent se venger sur une putain, et ça leur fait du bien, et la putain doit comprendre ça»
« Si une femme avait vraiment le sang-froid, le doigté, la délicatesse et le courage nécessaire pour passer ce moment difficile, elle ne se ferait pas tuer »
http://spermufle.wordpress.com/2013/01/11/la-pute-au-grand-coeur/
J'y cite quelques extraits du discours de la Dame :
« Ils viennent se venger sur une putain, et ça leur fait du bien, et la putain doit comprendre ça»
« Si une femme avait vraiment le sang-froid, le doigté, la délicatesse et le courage nécessaire pour passer ce moment difficile, elle ne se ferait pas tuer »
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