La prostitution n'est pas un métier
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55 participants
- GruntBanni·e
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Date d'inscription : 27/09/2011
Re: La prostitution n'est pas un métier
23.05.13 0:28
C'est aussi dangereux que bosser pour le GIGN, mais traité bien différemment par la société.
- JezebelAncien⋅ne
- Messages : 2182
Date d'inscription : 18/07/2012
Re: La prostitution n'est pas un métier
23.05.13 0:37
Ben je suis pas sûre tu vois, parce qu'il ne me semble pas que le GIGN intervienne tant que ça, donc proportionnellement, je ne suis pas sûre que les risques soient les mêmes (il y a des risques de viols et de se faire battre aussi au GIGN?)Grunt a écrit:C'est aussi dangereux que bosser pour le GIGN, mais traité bien différemment par la société.
Et puis le GIGN n'a pas son origine dans le sexisme et la misogynie non plus (ce qui n'est pas le cas pour la prostitution, qu'on la défende ou pas).
- AraignéeAncien⋅ne
- Messages : 4550
Date d'inscription : 02/09/2012
Re: La prostitution n'est pas un métier
23.05.13 1:46
Franchement, je crois que c'est bien plus dangereux que bosser pour le GIGN...
Aux USA, l'espérance de vie d'une pute, c'est 34 ans quoi.
Aux USA, l'espérance de vie d'une pute, c'est 34 ans quoi.
- JezebelAncien⋅ne
- Messages : 2182
Date d'inscription : 18/07/2012
Re: La prostitution n'est pas un métier
23.05.13 8:32
+ 1 Antisexisme!!
Re: La prostitution n'est pas un métier
23.05.13 9:21
Jezebel a écrit:Ce qui fait d'ailleurs, que je ne comprends pas vraiment comment elle pouvait le défendre avec autant d'acharnement, ni surtout que, puisque c'est connu, l'on puisse continuer à défendre cette activité sachant ce que ça peut engendrer comme violences...
GR disait que c'était les risques du "métier", que d'autres activités étaient dangereuses. Elle ne voyait pas le problème alors que les autres activités, ben tout le monde sait qu'elles sont potentiellement dangereuses (police, armée, sécurité), alors que la prostitution est censée être une activité "ludique et cool". L'espérance de vie des prostituées est parmi les plus basses au monde, si on considère l'activité comme un métier. Cela aussi devrait interroger les hérauts de la "liberté de vendre son corps".
GR disait d'ailleurs tout le temps qu'elle adorait donner aux hommes ce qui leur manquait, quel altruisme
J'ai vu plusieurs interviews d'elle et dans la même phrase, elle disait "j'ai failli mourir étranglée mais qu'est-ce que c'était génial de donner du plaisir aux hommes".
AS a écrit:D'ailleurs, je trouve tous ces petits mâles qui commentent les articles sur internet, bien hypocrites. Ils s'acharnent à te dire que "travailler avec son sexe", c'est comme travailler avec ses mains, que c'est "un métier comme un autre". Et en même temps, ils s'acharnent à le défendre
Ils étaient où ces mectons quand on a interdit le lancer de nains, qui était aussi une activité "libre et consentie" ? Ah ouais, ça ne concernait pas le corps des femmes mais celui des hommes principalement. Curieux non ? Moi j'attends une manif du Strass pour que les nains puissent être lancés "librement", c'est leur corps après tout, c'est scandaleux qu'on leur interdise d'être utilisé comme objet et qu'ils gagnent de l'argent de cette façon. Saleté de gauchistes, destructeurs de libertés
Par ailleurs l’un des principaux ressorts dans la pornographie consiste pour les hommes à obtenir l’aveu de plaisir par les femmes, après qu’elles ont montré quelque résistance. Les phrases du type « avoue que tu aimes ça » « avoue que tu es une salope » résument en grande partie ce script, comme si le refus initial des femmes servait de masque à leur véritable désir, qui est celui d’être mise au service sexuel des hommes, et qu’elles ne peuvent pas assumer ouvertement.
Dans bcp de films mainstream (ni porno ni érotiques) des années 60-70, ce scénario revient : un homme (généralement quadra) s'entiche d'une beauté de 18-20 ans et bien sûr, elle refuse, le repousse, il insiste et finalement, elle "consent" et ça se finit au lit où elle gémit de plaisir. Donc même hors pornographie et avant sa diffusion massive, ce scénario était très fréquent => non veut dire oui mais attends un peu
- InvitéInvité
Re: La prostitution n'est pas un métier
23.05.13 11:29
Araignée, Pierre, c'est quoi votre source par rapport à cette espérance de vie?Araignée a écrit:Aux USA, l'espérance de vie d'une pute, c'est 34 ans quoi.
Re: La prostitution n'est pas un métier
23.05.13 15:13
Cela concerne la prostitution aux USA, principalement. Je crois que ça vient du site http://www.prostitutionetsociete.fr/ mais je ne sais plus quel article
- InvitéInvité
Re: La prostitution n'est pas un métier
23.05.13 16:54
Je n'ai pas pu trouver l'article en question.
- OmniiaAncien⋅ne
- Messages : 2909
Date d'inscription : 20/10/2012
Re: La prostitution n'est pas un métier
23.05.13 17:24
Je crois que la source originelle est celle-ci : http://aje.oxfordjournals.org/content/159/8/778.full
Ça a notamment été repris ici par Muriel Salmona : http://stopauxviolences.blogspot.fr/2012/09/article-de-muriel-salmona-en-reponse.html
Ça a notamment été repris ici par Muriel Salmona : http://stopauxviolences.blogspot.fr/2012/09/article-de-muriel-salmona-en-reponse.html
- LuxLisbon—
- Messages : 304
Date d'inscription : 19/05/2013
Re: La prostitution n'est pas un métier
23.05.13 18:58
Je commence par te présenter mes excuses si j'ai été désagréable. Je me suis moi-même sentie agressée après mon premier message qui n'avait pourtant rien d'agressif, et l'accusation de "ne pas être féministe" me blesse toujours, parce que je pense être tout autant légitime que les autres femmes et les autres hommes qui luttent pour les droits des femmes (et pour les droits des hommes). Si je viens ici, ce n'est pas par esprit de contradiction, mais bien parce que la question du féminisme est essentielle pour moi, depuis bien longtemps, et je suis la première à être agacée d'entendre partout : "je ne suis pas féministe" dans la bouche des femmes qui ont toutes bénéficié des avancées permises par nos aînées.cleindo a écrit:ba c'est pas la peine de me sauter à la gorge... J'ai juste dit (vu que tu soulignais n'avoir lu que la première page) que c'était pas utile de porter un jugement de "renégate" sur 5 lignes.
Bon et puis ne pas connaitre une situation ce n'est pas être débile non plus (ou alors j'ai un QI négatif à ce compte là)
Sérieux ce forum me fatigue de plus en plus... doit y avoir trop d'ego au mètre carré.
Le discours dominant, c'est à mon sens davantage celui qu'on entend au sommet de l'Etat (abolition de la prostitution et pénalisation des clients) que le mien. D'ailleurs, je connais très peu de personnes (hormis celles du STRASS) qui partagent mon point de vue sur la prostitution.Lubna a écrit:Différent de quoi?LuxLisbon a écrit:
J'ose tout de même espérer qu'on peut avoir un discours différent du discours habituel et dominant, sans se faire automatiquement taxer de bêtise.
.
Le discours dominant c est toi qui le véhicule.
Après, évidemment, si on veut parler de cette majorité "silencieuse" un peu beauf qui considère que la prostitution, ça empêche les viols ou je ne sais quelle autre bêtise... mais là encore je ne crois pas que ce discours soit dominant dans les milieux intellectuels, et c'était plutôt de ça dont il était question pour moi.
Je te remercie pour cet avis.Poussin Machin a écrit:Je rejoins Lux sur le fait que chaque femme doit pouvoir être libre de disposer de son corps. Si demain j'ai envie de me prostituer, ça ne regarde que moi.
Le problème (enfin tel que je vois ça en tout cas) est la façon dont est vue la prostitution, que ce soit par les clients/sympathisants et les abolitionnistes. Ce qui me dérange le plus est "ça permet qu'il y ait moins de viols" ou les trucs de ce genre. Sérieux ? C'était sûrement vrai à une époque où baiser une meuf venant des bas-fonds de la rue et lui donner quelques pièces en échange, tout le monde s'en foutait, et personne ne risquait grand chose, a contrario si c'était une femme de noblesse là c'était mal.
Mais la prostitution ce n'est plus ça, et maintenant, malheureusement, les "assouvissements de pulsions", c'est avec n'importe qui que certains le font, consentement ou non.
Ce qui me gène dans la prostitution, ce sont ces arguments bidons, alors que le fait de pouvoir disposer sont corps est plus juste à mon sens. Ce qui me gène aussi, ce sont les proxénètes derrière, ou le besoin d'argent "facile". Après, pourquoi une femme/un hommes ne pourrait pas être prostitué.e si cette personne aime avoir des relations sexuelles avec des inconnu.e.s et donc tant qu'à y être gagner des sous en faisant ce qui lui plaît ?
Après, même si la prostitution était cool et glamour, je ne pense pas que ce serait possible de l'exercer bien longtemps, tout au plus une petite dizaine d'années.
Enfin bon, pour résumer, je ne suis ni pour, ni contre.
Je te rejoins : la prostitution n'empêche pas le viol, et si j'y suis favorable, ce n'est certainement pas pour cette raison-là. Le viol est le moyen de prendre le pouvoir sur quelqu'un, de le dominer, de l'anéantir ; je pense que, si certains clients sont dans cet état d'esprit-là, ce n'est certainement pas la majorité, qui est en général motivée par une misère affective et sexuelle (et probablement sociale aussi).
Qu'on ne me comprenne pas mal : je ne suis pas en train d'excuser / légitimer le fait qu'un homme aille voir une prostituée. Je dis juste que je ne pense pas que les pervers qui ont besoin de violer, dominer, détruire pour jouir aillent spontanément voir des professionnelles.
Mais personne ne demande de légitimation sociale de la sexualité BDSM — d'ailleurs aucune sexualité n'a à être jugée socialement, point à la ligne. Chacun fait ce qu'il veut de ses fesses, et je ne me demande effectivement pas si ce que je fais est suffisamment féministe ou non lorsque je retire ma culotte.Van Poppel a écrit:Euh oui, m'enfin en même temps ça n'exonère pas d'une réflexion sur ce qui se cache derrière le "plaisir". J'ai connu (pas comme client) une prostituée qui aimait se faire brûler par des mégots de clopes et uriner dans le vagin (CAD recueillir les déchets des hommes dans son intimité). Le combo rhétorique "plaisir + entre adultes consentants" semble constituer un bouclier à toute réflexion sur le sujet, et ça m'agace. Précisément parce que c'est l'un des arguments les plus utilisés par les prostitueurs. Les gens ont tendance à penser que tout ce qui procure du plaisir est forcément positif. Que des masos prennent plaisir à leur humiliation/destruction, soit, il ne s'agit pas de les en empêcher. En revanche, qu'elles ne viennent pas quémander une légitimation sociale de ce qui faut bien appeler leur pathologie mentale, et l'instauration d'un cadre réglementaire qui va nuire aux autres femmes dans leur ensemble. A commencer par celles amenées sur les trottoirs ou dans les bordels de pays à l'approche "pragmatique", comme les Pays-Bas, l'Allemagne ou l'Espagne. Sans parler de l'impact sur la culture du viol, comment pourra-t-on éduquer les jeunes mâles à associer désir et consentement, à ne pas être des baiseurs-profiteurs de détresse si on rouvre des bordels un peu partout ?
La culture du viol n'a pas grand-chose à voir avec la prostitution, et si on permettait aux prostituées d'avoir des conditions de travail meilleures, elles seraient certainement vues d'une autre manière aussi par leurs potentiels clients. L'image de la femme est-elle davantage respectée à Barbès où tous les soirs, on voit des jeunes femmes originaires d'Afrique qui proposent des pipes sur un coin de trottoir ?
Mais là, on parle du corps, de la sexualité. J'estime qu'à ce sujet, oui, chacun et chacune fait bien ce qu'il veut. Il faudrait s'interdire de coucher avec qui on veut, sous prétexte de gâter l'image de la femme qui se respecte ?Jezebel a écrit:Je réagis rapidement aux propos du type "ça ne regarde que moi".
Je suis sans doute une control-freak de la condition féminine (on m'a accusée d'être une dictatrice sur un autre forum) mais dans la situation présente (et passée, et, hélas, sans doute future), non, ce que fait chaque femme ne regarde pas qu'elle mais l'ensemble de la classe femme ('cest d'ailleurs ce qu'exprime ma signature)
On a beau baigner dedans depuis un bail (toute notre vie pour certains/certaines) à un moment il faut savoir prendre du recul par rapport à l'individualisme forcené proné par l"idéologie néo-libérale ambiante.
J'ai du mal à voir une once de cohésion dans un mouvement de libération si chacun y est pour sa pomme et pense que chacune devrait y être de la même manière. Et je pense encore moins que la libération des femmes passe par la revendication de phénomènes oppressifs au nom de la liberté. Genre c'est mon choix d'avoir une conduite qui est oppressive.
Le féminisme, c'est pour moi justement la possibilité de faire évoluer les mentalités, et de respecter toutes les femmes — celles qui attendent le mariage pour coucher, de même que celles qui se donnent à n'importe qui. On ne devient pas moins intéressant, moins important, moins digne de respect parce qu'on a des relations sexuelles diverses et variées, tarifées ou non. Voilà pour moi le point essentiel : ce qu'on est, intrinsèquement, n'a pas grand-chose à voir avec ce qu'on fait (ou qu'on ne fait pas) dans son lit. Je suis tout autant opposée au jugement des personnes hyper-sexuelles qu'au jugement des personnes asexuelles. Chacun gère son corps comme il le souhaite et comme il le peut ; et tant qu'on reste dans les limites du consentement mutuel (et qu'on le veuille ou non, le fait d'avoir un contrat avec tarif rentre dans le cadre d'un consentement mutuel), il n'y a pas de problème, pas de honte, pas d'interdit.
Décider quel comportement est digne du féminisme, c'est tout autant réducteur et aliénant que les codes misogynes qu'on nous a imposés pendant des siècles. Si j'essaie de m'affranchir des schémas machistes, ce n'est pas pour trouver de nouveaux schémas, même féministes, qui me dictent la conduite à suivre !
Cela me semble absolument évident, oui. Probablement difficile à entendre pour certains, mais encore une fois, je ne pense pas que les choses soient toujours toutes blanches ou toutes noires, et on peut aller voir une prostituée (ou un prostitué : les femmes qui ont affaire à des escorts, que sont-elles ? des féministes ? des masculinistes ?) et considérer que les femmes sont les égales de l'homme, en tout point.Van Poppel a écrit:Bon alors, si la prostitution n'est pas intrinsèquement une pratique d'oppression des femmes, si on peut être Féministe et prostituée, le corollaire c'est qu'on peut être client ET Féministe (puisque paraît-il la prostitution n'est pas une oppression sous certaines conditions).
Certes. Mais ces esclaves auraient été de toute manière emmenées ailleurs, s'il n'y avait pas eu ces pays-là pour les "accueillir". Et on est encore dans une question de trafic d'êtres humains, et je ne saurais dire encore une fois à quel point j'y suis évidemment farouchement opposée. Une fois de plus, il faut mettre les moyens pour démanteler ces réseaux, et je crois que cela peut se faire même avec une politique réglementariste.Araignée a écrit:@LuxLisbon
L'exemple de la Suède est moins un échec que l'exemple des pays réglementaristes (Pays-Bas, Allemagne...) où le nombre d'esclaves sexuel(le)s a explosé. On offre aux proxénètes des pays où la prostitution est favorisée, ils ne se privent pas d'y amener leur esclaves, en grand nombre. Ils peuvent librement les installer dans des maisons closes, ou dans la rue, et empocher la monnaie...
Mais lutter contre les clients, c'est comme lutter contre les prostituées. Révoquer la loi contre le racolage et en écrire une nouvelle pénalisant les clients, c'est absurde puisque cela va aboutir aux mêmes conséquences : des prostituées qui se cachent davantage et sont donc davantage fragilisées.Araignée a écrit:Sinon, encore une fois, il ne s'agit pas d'interdire de se prostituer, mais d'interdire aux proxénètes et aux clients de profiter de cette vulnérabilité.
Sauf qu'on peut décider de se prostituer, et le faire de manière indépendante, sans avoir de compte à rendre à personne ; l'esclavage, en revanche, impliquait la perte de son humanité. Ce n'est pas la même chose, du tout.Araignée a écrit:Il est vrai que l'abolition de la prostitution ne la fera pas disparaître, tout comme l'abolition de l'esclavage ne l'a pas fait disparaître non plus. Néanmoins, l'esclavage n'étant plus institutionnalisé, étant devenu illégal, plus personne ne le voit comme quelque chose allant de soi, et les victimes sont reconnues comme victimes (même les esclaves, et ils existent, qui ne se voient pas comme des victimes). De plus, le nombre d'esclaves a fortement baissé.
Interdire le meurtre ne l'a pas non plus totalement aboli, ce n'est pas pour autant qu'on remet en question cette interdiction...
D'ailleurs, la prostitution n'est pas franchement institutionnalisée chez nous : elle n'est simplement pas interdite. Ce n'est pas comme l'esclavage qui était clairement inscrit dans nos lois et où les personnes esclaves étaient considérées comme des marchandises. Une passe, cela peut avoir des conséquences psychologiques terribles, mais c'est une heure, deux heures, et le client s'en va. L'esclavage ne cesse jamais, et on n'est jamais le maître de soi, quand une prostituée indépendante peut refuser une passe, décider qui elle voit, qui elle ne voit pas, quels tarifs elle pratique, etc.
Cela me semble être la moindre des choses. J'ai le plus grand respect pour toutes les expériences de la vie, et je ne me permettrais jamais de juger, de questionner, de blesser. Tu as beaucoup de courage d'en parler, en tous les cas.Araignée a écrit:A part ça, merci pour ton respect vis à vis de mon vécu (je tiens à te remercier, parce que ce respect, je ne l'ai pas toujours eu).
La prostitution n'est pas qu'une affaire de femmes, déjà. Il y a aussi des femmes qui ont recours à des prestations d'escort, et je ne crois pas qu'elles considèrent pour autant que le corps de l'homme est une marchandise qu'elles peuvent posséder quand elles le souhaitent.l'elfe a écrit:@LuxLisbon j'aimerais bien te poser quelques questions:
Comment comptes-tu t'y prendre pour défendre le droit des femmes à se prostituer sans défendre le droit des hommes à disposer de l'accès au corps des femmes dès qu'ils en ont envie (moyennant finance)? Tu ne crois pas que c'est deux façons différentes de défendre la même chose?
Je pense tout simplement qu'il n'y a pas de mal à ce qu'un client aille voir une prostituée indépendante, dont c'est le choix. Si le contrat entre eux est établi, et que la prostituée l'accepte, alors où est le problème ? Le client, par ailleurs, n'aura pas forcément les prestations qu'il aura demandées : il y a un échange entre les deux pour trouver le meilleur arrangement, satisfaisant les deux parties. Cela ne me choque pas outre mesure, et je pense que s'il n'y avait que des prostituées indépendantes, et qui font ce métier par choix, les hommes ne considéreraient pas que l'accès au corps des femmes leur est "dû", mais bien qu'il s'agit d'un échange respectueux où l'un et l'autre ont quelque chose à s'apporter, mutuellement.
Ah, j'admets que si on pouvait se passer de la contrainte matérielle, qu'il s'agisse du sexe, du travail, on serait tous bien plus heureuxl'elfe a écrit:Tu ne crois pas que le droit de se prostituer se transforme très vite en un devoir de se prostituer, et donc en une dépossession de son corps? Est-ce que vendre un service sexuel c'est vraiment la liberté sexuelle? Est-ce que justement la liberté sexuelle ne devrait pas s'exercer hors de toute contrainte, y compris matérielle?
L'idée, c'est qu'on doit se faire de l'argent pour vivre. L'idée, c'est aussi que beaucoup de gens exercent des métiers qui ne leur plaisent pas, où ils sont harcelés, humiliés, diminués. L'idée, c'est que souvent, on touche des clopinettes quand on n'a pas eu le bon piston, ou l'idée d'aller faire du commerce.
Du coup, cela ne me choque pas que certains et certaines choisissent la voie de la prostitution, s'ils ne se font pas violence en se dirigeant vers ce métier-là. Il y a des tas de métiers que je trouve dégradants et écoeurants, bien plus que la prostitution, et tant que notre monde sera réagi par l'argent, il faudra se faire à l'idée que les gens auront envie de trouver cet argent où ils le peuvent, comme ils le peuvent.
Je répète mais pour moi l'essentiel c'est que ce ne soit pas une violence que l'on s'inflige. Très sincèrement, si certains et certaines y trouvent du plaisir, et en plus se font de l'argent, je ne vois vraiment pas qui je suis pour leur dire d'arrêter.
Re: La prostitution n'est pas un métier
23.05.13 19:07
C'est vrai qu'il y a 2% des clients de prostitution qui sont des femmes et 10% des prostitués qui sont des hommes mais je ne vois pas en quoi ça répond à ma question.
Et je trouve un peu dégueulasse (excuse-moi) de défendre la prostitution sous prétexte qu'il existe d'autres situations dégradantes ou humiliantes…
Et je trouve un peu dégueulasse (excuse-moi) de défendre la prostitution sous prétexte qu'il existe d'autres situations dégradantes ou humiliantes…
- AraignéeAncien⋅ne
- Messages : 4550
Date d'inscription : 02/09/2012
Re: La prostitution n'est pas un métier
23.05.13 21:29
(Je vais faire du quote-war, mais c'est juste que c'est plus pratique pour moi, afin de répondre à tout ce à quoi j'ai envie de répondre. J'en suis désolée, je suis en train d'apprendre à faire autrement, mais j'y arrive pas toujours.)
Sinon, on est bien d'accord que la prostitution n'empêche pas les viols et les abus sexuels. Pas parce que les pervers et les violeurs ne vont pas voir de prostituées, mais parce que quand ils y vont (et ils y vont !), ils abusent sexuellement de la femme qu'ils payent, comme ils auraient abusé d'une femme qu'ils n'auraient pas payée (et pas que sexuellement, en fait, outre les viols, y a aussi les coups qui sont loin d'être rares, et les insultes n'en parlons même pas...). Ce qui, dans la tête de certains, serait moins grave (parce qu'une pute, au fond, serait là pour ça), d'où l'argument que cela diminuerait le nombre d'abus (le sous-entendu étant "diminuerait le nombre d'abus... sur des femmes qui ne sont pas des putes et dont le consentement a de la valeur").
C'est bien vis-à-vis des clients que, par contre, mon avis diverge : qu'un homme (ou une femme, même si elles sont rares) achète un service sexuel, qu'il obtienne le droit de baiser un(e) parfait(e) inconnu(e) sans se préoccuper ou à minima sans avoir aucun moyen de savoir si cet(te) inconnu(e) est un(e) esclave ou une personne en état de grande détresse psychologique, que des hommes puisse considérer que leur envie de se décharger sexuellement passe avant l'intégrité psychique et l'humanité de quelqu'un, c'est ça, qui est condamnable éthiquement. S'il n'y avait que des putes libres, bien dans leur tête, heureuses de faire ce qu'elles font et y prenant du plaisir, on n'aurait effectivement pas à se mêler de ça. Sauf que les putes vraiment libres, sont des exceptions (qui existent, je ne le nie pas).
Alors certes, pénaliser les clients aura des conséquences pour les prostituées (moins de clients, par exemple). C'est pour ça à mon avis qu'il faut absolument que ce soit accompagné d'une vraie campagne d'aide aux prostituées, et aussi d'éducation de la population à la violence que représente (dans la majorité des cas) la prostitution.
Mais on ne peut pas dire que pénaliser les prostituées ou pénaliser les clients revient au même. Ce serait un peu comme de dire que pénaliser les violeurs serait la même chose que faire un délit pour les victimes de viols, et que si on ne condamnait pas le fait de violer, les viols ne seraient pas cachés, et du coup les victimes de viols seraient plus visibles, moins isolées et moins fragilisées
Ceci dit, la pénalisation des clients touchera surtout les plus visibles, ceux qui vont voir des prostituées de rue, et moins ceux qui vont voir des escorts. Or les prostituées de rue, sont je pense plus vulnérables, et bien plus souvent victimes de la traite, que les escorts. Les tarifs étant beaucoup moins élevés (40 euros la passe dans la rue), elles sont la plupart du temps obligées d'enchaîner les passes (10, 20 par soir... comment peut-on penser que cela n'a aucune influence sur leur psychisme et leur sexualité ?), elles sont plus facilement enclines à accepter des rapports non protégés (parce que ces andouilles de clients, surtout ceux qui n'ont pas connu les années Sida, c'est à dire les moins de 35 ans, payent plus cher si on accepte de le faire sans condom), elles peuvent moins facilement refuser des pratiques qui leur déplaisent. Bref, quand une prostituée déclare qu'elle exerce cette activité librement, qu'elle y gagne bien sa vie, qu'elle n'a pas subi de traumatismes sexuels, que c'est elle qui gère comment se passe la rencontre, c'est la plupart du temps une escort (même si des escorts victimes de la traite ou vulnérables, y en a aussi un paquet). Or, ce qu'il se passe dans un appartement privé ou même un hôtel, est bien moins visible que ce qu'il se passe dans la rue. Et ce qu'il se passe dans la rue, c'est glauque, et que des gars soient prêts à payer pour participer à cette horreur, ben je trouverais ça plus que normal que la loi leur dise que non, ce n'est pas acceptable.
Quand à refuser des pratiques, quand tu es seule avec un client, un parfait inconnu qui dans sa tête a acheté le droit à ce que tu ne lui refuses rien, refuser une pratique t'expose à te faire cogner la tronche.
Et les tarifs, pareil. Tu penses à l'escorting, là. Dans la rue, c'est 40 euros la passe, 20 la pipe. A la limite, tu peux demander 5 ou 10 euros de plus. Le jour où, voulant me débarrasser d'un type insistant et que je ne sentais pas, je lui ai demandé 200 euros dans l'espoir qu'il laisse tomber, j'ai fini évanouie dans un terrain vague, violée pendant que j'étais inconsciente, la tronche en sang et une dent en moins... (et j'ai même pas eu un centime. Et en prime j'ai du traverser la moitié de la ville dans un quartier craignos, seule à 4 heures du matin, sans savoir exactement où j'étais, à part vaguement la direction où je devais aller, avec la douleur lancinante dans la bouche, sur le visage et dans le ventre).
(NB : Quand je parlais d'institutionnalisation, je pensais aux pays réglementaristes, pas à la France qui est abolitionniste, mais que le STRASS voudrait voir devenir réglementariste, donc avec la prostitution institutionnalisée.)
C'est un peu beaucoup la roulette russe, ce truc, quoi... Je te tire une balle dans la tête, mais comme une balle sur six est à blanc et que c'est celle-là qui est sortie, ben il n'y avait pas de mal à ce que je te tire dans la tête.
Et d'autre part, c'est carrément du nivellement par le bas, cet argument. Il y a effectivement des gens qui, dans le cadre de leur travail, sont humiliés, harcelés, rabaissés. Et c'est inacceptable, on devrait se battre pour que ça n'existe plus, on devrait se battre contre le capitalisme qui donne plus de valeur à l'argent qu'à l'humain, et ne pas considérer que tout ça est normal et qu'on peut rajouter la prostitution à ce capitalisme et ce mépris de l'humanité des gens.
J. Trinquart parle de l'ambivalence, je trouve que c'en est un bon exemple... (et même si Grisélidis Réal est l'égérie des pro-prostitution, je ne me permettrais pas de la critiquer elle. Elle faisait sans doute ce qu'elle pouvait, avec son vécu, ses défenses psychiques, etc).pierregr a écrit:GR disait d'ailleurs tout le temps qu'elle adorait donner aux hommes ce qui leur manquait, quel altruisme
J'ai vu plusieurs interviews d'elle et dans la même phrase, elle disait "j'ai failli mourir étranglée mais qu'est-ce que c'était génial de donner du plaisir aux hommes".
Pas par moi, j'espère ? Parce que même si je suis assez virulente sur ce sujet qui me touche particulièrement (avec d'autres, comme la discrimination envers les UD par exemple), je suis vraiment pas quelqu'un d'agressif, avec qui que ce soit. Donc j'espère que tu n'as pas mal interprété mes messages...LuxLisbon a écrit:Je me suis moi-même sentie agressée après mon premier message qui n'avait pourtant rien d'agressif.
Si ce n'est effectivement pas le cas au gouvernement, qui penche plus vers l'abolitionnisme, dans les médias, les discours pro-STRASS sont quand même largement sur-représentés (en particulier à la télévision), et donc dominants.LuxLisbon a écrit:Le discours dominant, c'est à mon sens davantage celui qu'on entend au sommet de l'Etat (abolition de la prostitution et pénalisation des clients) que le mien. D'ailleurs, je connais très peu de personnes (hormis celles du STRASS) qui partagent mon point de vue sur la prostitution.
La majorité des clients sont mariés ou en couple, ils ne sont donc pas si nombreux à aller voir des prostituées pour une question de misère affective et sexuelle (et quid de la misère affective et sexuelle des prostituées ? Parce que même quand on n'est pas vaginique comme moi, quand on fait 10 passes par jour, avoir une vie sexuelle à côté, c'est mission impossible...). De ce que j'ai constaté, ce que venaient chercher mes clients, en majorité, c'était ma soumission à leurs désirs, voire le plaisir de se rendre compte que j'avais mal...LuxLisbon a écrit:Je te rejoins : la prostitution n'empêche pas le viol, et si j'y suis favorable, ce n'est certainement pas pour cette raison-là. Le viol est le moyen de prendre le pouvoir sur quelqu'un, de le dominer, de l'anéantir ; je pense que, si certains clients sont dans cet état d'esprit-là, ce n'est certainement pas la majorité, qui est en général motivée par une misère affective et sexuelle (et probablement sociale aussi).
Qu'on ne me comprenne pas mal : je ne suis pas en train d'excuser / légitimer le fait qu'un homme aille voir une prostituée. Je dis juste que je ne pense pas que les pervers qui ont besoin de violer, dominer, détruire pour jouir aillent spontanément voir des professionnelles.
Sinon, on est bien d'accord que la prostitution n'empêche pas les viols et les abus sexuels. Pas parce que les pervers et les violeurs ne vont pas voir de prostituées, mais parce que quand ils y vont (et ils y vont !), ils abusent sexuellement de la femme qu'ils payent, comme ils auraient abusé d'une femme qu'ils n'auraient pas payée (et pas que sexuellement, en fait, outre les viols, y a aussi les coups qui sont loin d'être rares, et les insultes n'en parlons même pas...). Ce qui, dans la tête de certains, serait moins grave (parce qu'une pute, au fond, serait là pour ça), d'où l'argument que cela diminuerait le nombre d'abus (le sous-entendu étant "diminuerait le nombre d'abus... sur des femmes qui ne sont pas des putes et dont le consentement a de la valeur").
On est bien d'accord. Qu'une femme refuse tout rapport sexuel, qu'elle couche avec qui elle le souhaite ou qu'elle se fasse payer pour qu'on la baise, ne change rien (ou plutôt ne devrait rien changer) à sa dignité, à son humanité, à sa valeur.LuxLisbon a écrit:Le féminisme, c'est pour moi justement la possibilité de faire évoluer les mentalités, et de respecter toutes les femmes — celles qui attendent le mariage pour coucher, de même que celles qui se donnent à n'importe qui. On ne devient pas moins intéressant, moins important, moins digne de respect parce qu'on a des relations sexuelles diverses et variées, tarifées ou non. Voilà pour moi le point essentiel : ce qu'on est, intrinsèquement, n'a pas grand-chose à voir avec ce qu'on fait (ou qu'on ne fait pas) dans son lit. Je suis tout autant opposée au jugement des personnes hyper-sexuelles qu'au jugement des personnes asexuelles.
C'est bien vis-à-vis des clients que, par contre, mon avis diverge : qu'un homme (ou une femme, même si elles sont rares) achète un service sexuel, qu'il obtienne le droit de baiser un(e) parfait(e) inconnu(e) sans se préoccuper ou à minima sans avoir aucun moyen de savoir si cet(te) inconnu(e) est un(e) esclave ou une personne en état de grande détresse psychologique, que des hommes puisse considérer que leur envie de se décharger sexuellement passe avant l'intégrité psychique et l'humanité de quelqu'un, c'est ça, qui est condamnable éthiquement. S'il n'y avait que des putes libres, bien dans leur tête, heureuses de faire ce qu'elles font et y prenant du plaisir, on n'aurait effectivement pas à se mêler de ça. Sauf que les putes vraiment libres, sont des exceptions (qui existent, je ne le nie pas).
Non, parce que la loi donne aussi le ton éthique d'une société. Si la loi affirme que les prostituées sont des délinquantes, dans l'esprit des gens, elles le sont (et c'est pour ça que je maudis cette fichue loi sur le racolage). Alors que si la loi affirme qu'elles sont des victimes et qu'on doit les aider comme telles, cela influera (pas d'un coup, mais petit à petit) la perception que monsieur tout le monde aura de ces femmes (et hommes).LuxLisbon a écrit:Mais lutter contre les clients, c'est comme lutter contre les prostituées. Révoquer la loi contre le racolage et en écrire une nouvelle pénalisant les clients, c'est absurde puisque cela va aboutir aux mêmes conséquences : des prostituées qui se cachent davantage et sont donc davantage fragilisées.
Alors certes, pénaliser les clients aura des conséquences pour les prostituées (moins de clients, par exemple). C'est pour ça à mon avis qu'il faut absolument que ce soit accompagné d'une vraie campagne d'aide aux prostituées, et aussi d'éducation de la population à la violence que représente (dans la majorité des cas) la prostitution.
Mais on ne peut pas dire que pénaliser les prostituées ou pénaliser les clients revient au même. Ce serait un peu comme de dire que pénaliser les violeurs serait la même chose que faire un délit pour les victimes de viols, et que si on ne condamnait pas le fait de violer, les viols ne seraient pas cachés, et du coup les victimes de viols seraient plus visibles, moins isolées et moins fragilisées
Ceci dit, la pénalisation des clients touchera surtout les plus visibles, ceux qui vont voir des prostituées de rue, et moins ceux qui vont voir des escorts. Or les prostituées de rue, sont je pense plus vulnérables, et bien plus souvent victimes de la traite, que les escorts. Les tarifs étant beaucoup moins élevés (40 euros la passe dans la rue), elles sont la plupart du temps obligées d'enchaîner les passes (10, 20 par soir... comment peut-on penser que cela n'a aucune influence sur leur psychisme et leur sexualité ?), elles sont plus facilement enclines à accepter des rapports non protégés (parce que ces andouilles de clients, surtout ceux qui n'ont pas connu les années Sida, c'est à dire les moins de 35 ans, payent plus cher si on accepte de le faire sans condom), elles peuvent moins facilement refuser des pratiques qui leur déplaisent. Bref, quand une prostituée déclare qu'elle exerce cette activité librement, qu'elle y gagne bien sa vie, qu'elle n'a pas subi de traumatismes sexuels, que c'est elle qui gère comment se passe la rencontre, c'est la plupart du temps une escort (même si des escorts victimes de la traite ou vulnérables, y en a aussi un paquet). Or, ce qu'il se passe dans un appartement privé ou même un hôtel, est bien moins visible que ce qu'il se passe dans la rue. Et ce qu'il se passe dans la rue, c'est glauque, et que des gars soient prêts à payer pour participer à cette horreur, ben je trouverais ça plus que normal que la loi leur dise que non, ce n'est pas acceptable.
Je n'ai jamais été une esclave, je n'ai jamais eu de mac. Pourtant, le sentiment d'avoir perdu mon humanité, je sais ce que c'est. Vomir presque tout ce que je mangeais, m'évanouir quand je marchais, ou avoir tellement mal au ventre que je ne pouvais plus marcher, être totalement incapable de parler à mes amis (je venais chez eux, je disais bonjour, je passais parfois l'après-midi entière chez eux, sans pouvoir dire un mot de plus, et s'ils essayaient de me faire parler, je bégayais et paniquais mais je n'y arrivais pas. Parce que la seule chose que j'aurais voulue dire, était indicible), se sentir comme un fantôme, un mort-vivant, c'était ça, pour moi, la prostitution. Un état où j'étais si faible psychiquement que non, toute seule, j'aurais jamais pu en sortir, je n'avais pas la force. Je pouvais juste continuer à m'enfoncer, inexorablement, dans la tombe que j'étais en train de me creuser (jusqu'à ce qu'un ami me sorte de là).LuxLisbon a écrit:Sauf qu'on peut décider de se prostituer, et le faire de manière indépendante, sans avoir de compte à rendre à personne ; l'esclavage, en revanche, impliquait la perte de son humanité. Ce n'est pas la même chose, du tout.
D'ailleurs, la prostitution n'est pas franchement institutionnalisée chez nous : elle n'est simplement pas interdite. Ce n'est pas comme l'esclavage qui était clairement inscrit dans nos lois et où les personnes esclaves étaient considérées comme des marchandises. Une passe, cela peut avoir des conséquences psychologiques terribles, mais c'est une heure, deux heures, et le client s'en va. L'esclavage ne cesse jamais, et on n'est jamais le maître de soi, quand une prostituée indépendante peut refuser une passe, décider qui elle voit, qui elle ne voit pas, quels tarifs elle pratique, etc.
Quand à refuser des pratiques, quand tu es seule avec un client, un parfait inconnu qui dans sa tête a acheté le droit à ce que tu ne lui refuses rien, refuser une pratique t'expose à te faire cogner la tronche.
Et les tarifs, pareil. Tu penses à l'escorting, là. Dans la rue, c'est 40 euros la passe, 20 la pipe. A la limite, tu peux demander 5 ou 10 euros de plus. Le jour où, voulant me débarrasser d'un type insistant et que je ne sentais pas, je lui ai demandé 200 euros dans l'espoir qu'il laisse tomber, j'ai fini évanouie dans un terrain vague, violée pendant que j'étais inconsciente, la tronche en sang et une dent en moins... (et j'ai même pas eu un centime. Et en prime j'ai du traverser la moitié de la ville dans un quartier craignos, seule à 4 heures du matin, sans savoir exactement où j'étais, à part vaguement la direction où je devais aller, avec la douleur lancinante dans la bouche, sur le visage et dans le ventre).
(NB : Quand je parlais d'institutionnalisation, je pensais aux pays réglementaristes, pas à la France qui est abolitionniste, mais que le STRASS voudrait voir devenir réglementariste, donc avec la prostitution institutionnalisée.)
Mais comment il le sait, le client, si la fille qu'il paye est indépendante, si c'est son choix ? Puisque jamais, une femme prise dans un réseau ne l'avouera à ses clients, et puisque jamais, une femme qui se prostitue par pulsion autodestructrice, ne l'avouera non plus ? Comment il sait que la femme qu'il paye, fait partie du petit pourcentage qui le vit vraiment bien ?LuxLisbon a écrit:Je pense tout simplement qu'il n'y a pas de mal à ce qu'un client aille voir une prostituée indépendante, dont c'est le choix.
C'est un peu beaucoup la roulette russe, ce truc, quoi... Je te tire une balle dans la tête, mais comme une balle sur six est à blanc et que c'est celle-là qui est sortie, ben il n'y avait pas de mal à ce que je te tire dans la tête.
D'une part, la sexualité c'est quand même quelque chose de bien plus intime, en principe, que ce qui est en jeu dans bien des boulots. La comparaison "louer son sexe c'est comme louer ses bras", c'est vachement étrange. Parce que si on va par là, un inconnu qui me touche le sexe, je devrais le vivre de la même façon que s'il m'avait juste touché le bras... et si quelqu'un me viole, je ne devrais pas plus mal le vivre que s'il m'avait juste serrée dans ses bras ?LuxLisbon a écrit:Ah, j'admets que si on pouvait se passer de la contrainte matérielle, qu'il s'agisse du sexe, du travail, on serait tous bien plus heureux
L'idée, c'est qu'on doit se faire de l'argent pour vivre. L'idée, c'est aussi que beaucoup de gens exercent des métiers qui ne leur plaisent pas, où ils sont harcelés, humiliés, diminués. L'idée, c'est que souvent, on touche des clopinettes quand on n'a pas eu le bon piston, ou l'idée d'aller faire du commerce.
Et d'autre part, c'est carrément du nivellement par le bas, cet argument. Il y a effectivement des gens qui, dans le cadre de leur travail, sont humiliés, harcelés, rabaissés. Et c'est inacceptable, on devrait se battre pour que ça n'existe plus, on devrait se battre contre le capitalisme qui donne plus de valeur à l'argent qu'à l'humain, et ne pas considérer que tout ça est normal et qu'on peut rajouter la prostitution à ce capitalisme et ce mépris de l'humanité des gens.
Re: La prostitution n'est pas un métier
23.05.13 21:53
Alors quoi ? Je suis péremptoire parce que pour moi les prostitueurs n'ont pas leur mot à dire ? Bah oui, je pense que même si tout le monde était pour la prostitution, il n'y a que les prostitué.e.s qui ont leur mot à dire sur leur activité. Parce que c'est elleux qui pratiquent cette activité et qui sont donc le plus à même de parler de leur expérience.Van Poppel a écrit:Tu es atrocement péremptoire. Et, oui, que tu le veuilles ou non, dans un cadre non-abolo, CAD où l'on ne juge pas la prostitution comme étant intrinsèquement un problème, les prostitueurs ont leur mot à dire. Ils en font un enjeu de liberté individuelle, et non un problème spécifique à la condition féminine. Raison pour laquelle les macho-masculinistes n'hésitent jamais à récupérer les discours du STRASS.
Que des machos-maculinistes récupèrent les propos du STRASS pour embellir leur petits discours, ça m'énerve.
Pour info, il n'y a pas qu'un seul féminisme.Van Poppel a écrit:Sinon, l'histoire des "brevets de Féminisme" me fatigue un peu. Faut-il être femme et se prétendre Féministe pour l'être véritablement ? Marcella Iacub se prétend Féministe, faudrait donc s'interdire de lui objecter que c'est pas le cas ? A ce compte-là, le Féminisme ne serait pas une histoire de discours ni d'actes, mais de ressenti personnel et d'état d'esprit. Autrement dit, n'importe qui et surtout n'importe quoi pourrait être caractérisé comme Féministe. Ou comment vider le concept de sa substance.
Pour le BDSM, d'autres ont déjà répondu. Je rajouterai toutefois que ce n'est pas parce que quiconque pratique le BDSM qu'ille ne s'est pas remis.e en question. En fait, à dire vrai, je ne vois pas en quoi les pratiques sexuelles des un.e.s et des autres te (nous) concerne.
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Re: La prostitution n'est pas un métier
23.05.13 22:38
Ah non, la roulette russe, les deux joueurs prennent le même risque. Ce serait plus logique de la légaliser, que de légaliser le recours à la prostitution (dans laquelle le risque n'est pas partagé équitablement).Araignée a écrit:
C'est un peu beaucoup la roulette russe, ce truc, quoi... Je te tire une balle dans la tête, mais comme une balle sur six est à blanc et que c'est celle-là qui est sortie, ben il n'y avait pas de mal à ce que je te tire dans la tête.
Re: La prostitution n'est pas un métier
23.05.13 23:39
Je réagis juste à ceci
Ce soir dans "Envoyé spécial", reportage sur la prostitution via le Net. On voit plein de choses intéressantes mais surtout, en rapport avec ce que tu dis, les policiers de la BRP (brigade de répression du proxénétisme) disent être souvent impuissants face aux mafias vu le manque de coopération de la part des pays de l'Est.
Lorsqu'une femme veut quitter un réseau de "sex tour", on fait pression sur elle de diverses façons: on menace de la blacklister et ainsi, elle ne trouvera pas de boulot dans un autre réseau (ce qui tendrait à démontrer une certaine connivence entre les réseaux mafieux). Il est aussi question de menaces sur sa famille restée au pays. Donc même si elle est "libre" au départ, si elle veut en sortir, tout sera fait pour la dissuader.
Le constat que je fais suite à cet aveu d'impuissance est simple : la seule solution est la pénalisation des clients. Se battre contre les mafias ne sert à rien vu que dès qu'on arrive à intercepter un sous-fifre et à fermer un site Internet, il rouvre dans un autre pays qq jours plus tard. Il faut donc attaquer le maillon faible de la chaîne : les clients.
Sinon, que penses-tu de la phrase "c'est combien ?" que doivent se farcir les femmes à cause de la prostitution ? Trouves-tu que cette phrase est logique, anodine ou au contraire, violente ? Crois-tu que le réglementarisme va régler ce problème ou l'amplifier ?
J'en profite pour poster mon compte-rendu de l'émission
Reportage très intéressant sur France2 dans "Envoyé spécial" consacré à la prostitution sur le Net.
Bcp de celles qui font des "sex tour" viennent d'Ukraine, de Russie, pays qui n'ont pas d'accord avec les polices europénnes, ce qui assure l'impunité des proxénètes derrière ces réseaux.
On voyait un client à Paris qui notait la prestation de la prostituée qu'il venait de rencontrer, ça lui paraissait tout à fait normal.
Une Polonaise était filmée à visage découvert, elle passait 3 semaines en France (Paris, Aix-en-Provence) avec des clients contactés via le Net, elle prétendait ne pas être dans un réseau. Je choisis les meilleurs clients disait-elle au début. On la retrouve à la fin du reportage, juste avant qu'elle ne reparte en Pologne : un de ses clients l'a harcelée et menacée de mort mais elle ne souhaite pas en parler devant la caméra, image glamour oblige. On la voit acheter un foulard à 400€, prix qu'elle considère raisonnable, au vu de ce qu'elle gagne (évalué à 10 mille € pendant son séjour en France).
Une juriste ukrainienne qui gagnait trop peu d'argent a commencé à se prostituer, elle gagne 2 mille € en Ukraine mais voudrait bcp plus car " c'est mieux en France, il y a plus de sécurité ". Mais elle n'avait pas de visa.
Le mot abolitionnisme n'a pas été prononcé, on rappelle seulement que la prostitution n'est pas interdite.
A revoir pendant qq temps en replay sur le site de France2 (uniquement pour les gens ayant une IP en France)
Page de l'émission : http://www.france2.fr/emissions/envoye-special
Pour le replay : http://pluzz.francetv.fr/videos/envoye_special.html
luxlisbon a écrit:Une fois de plus, il faut mettre les moyens pour démanteler ces réseaux, et je crois que cela peut se faire même avec une politique réglementariste.
Ce soir dans "Envoyé spécial", reportage sur la prostitution via le Net. On voit plein de choses intéressantes mais surtout, en rapport avec ce que tu dis, les policiers de la BRP (brigade de répression du proxénétisme) disent être souvent impuissants face aux mafias vu le manque de coopération de la part des pays de l'Est.
Lorsqu'une femme veut quitter un réseau de "sex tour", on fait pression sur elle de diverses façons: on menace de la blacklister et ainsi, elle ne trouvera pas de boulot dans un autre réseau (ce qui tendrait à démontrer une certaine connivence entre les réseaux mafieux). Il est aussi question de menaces sur sa famille restée au pays. Donc même si elle est "libre" au départ, si elle veut en sortir, tout sera fait pour la dissuader.
Le constat que je fais suite à cet aveu d'impuissance est simple : la seule solution est la pénalisation des clients. Se battre contre les mafias ne sert à rien vu que dès qu'on arrive à intercepter un sous-fifre et à fermer un site Internet, il rouvre dans un autre pays qq jours plus tard. Il faut donc attaquer le maillon faible de la chaîne : les clients.
Sinon, que penses-tu de la phrase "c'est combien ?" que doivent se farcir les femmes à cause de la prostitution ? Trouves-tu que cette phrase est logique, anodine ou au contraire, violente ? Crois-tu que le réglementarisme va régler ce problème ou l'amplifier ?
J'en profite pour poster mon compte-rendu de l'émission
Reportage très intéressant sur France2 dans "Envoyé spécial" consacré à la prostitution sur le Net.
Bcp de celles qui font des "sex tour" viennent d'Ukraine, de Russie, pays qui n'ont pas d'accord avec les polices europénnes, ce qui assure l'impunité des proxénètes derrière ces réseaux.
On voyait un client à Paris qui notait la prestation de la prostituée qu'il venait de rencontrer, ça lui paraissait tout à fait normal.
Une Polonaise était filmée à visage découvert, elle passait 3 semaines en France (Paris, Aix-en-Provence) avec des clients contactés via le Net, elle prétendait ne pas être dans un réseau. Je choisis les meilleurs clients disait-elle au début. On la retrouve à la fin du reportage, juste avant qu'elle ne reparte en Pologne : un de ses clients l'a harcelée et menacée de mort mais elle ne souhaite pas en parler devant la caméra, image glamour oblige. On la voit acheter un foulard à 400€, prix qu'elle considère raisonnable, au vu de ce qu'elle gagne (évalué à 10 mille € pendant son séjour en France).
Une juriste ukrainienne qui gagnait trop peu d'argent a commencé à se prostituer, elle gagne 2 mille € en Ukraine mais voudrait bcp plus car " c'est mieux en France, il y a plus de sécurité ". Mais elle n'avait pas de visa.
Le mot abolitionnisme n'a pas été prononcé, on rappelle seulement que la prostitution n'est pas interdite.
A revoir pendant qq temps en replay sur le site de France2 (uniquement pour les gens ayant une IP en France)
Page de l'émission : http://www.france2.fr/emissions/envoye-special
Pour le replay : http://pluzz.francetv.fr/videos/envoye_special.html
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Re: La prostitution n'est pas un métier
25.05.13 1:07
Je ne défends pas spécialement la prostitution : je dis juste que quand on sait ce qui se passe aujourd'hui au travail, je comprends qu'on préfère devenir escort et monnayer des services sexuels, plutôt que d'aller faire un boulot mal payé où on sera à la botte d'un petit chef détestable.l'elfe a écrit:C'est vrai qu'il y a 2% des clients de prostitution qui sont des femmes et 10% des prostitués qui sont des hommes mais je ne vois pas en quoi ça répond à ma question.
Et je trouve un peu dégueulasse (excuse-moi) de défendre la prostitution sous prétexte qu'il existe d'autres situations dégradantes ou humiliantes…
Après, même sans aller jusqu'à des conditions de travail détestables, je pense que chacun place la limite de son intimité où il le souhaite, et je n'ai pas de jugement à porter sur les personnes qui préfèrent faire quelques passes par semaine plutôt qu'aller pointer tous les matins au boulot.
Du tout ! Je ne sais plus qui c'était (et je n'ai pas envie de donner des pseudos, histoire de pointer du doigt les "méchants"), mais ça m'a agacée et j'ai du coup été un peu sèche. D'où l'importance d'échanger avec courtoisie, même quand nos idées divergent, et je te remercie vraiment de cet échange que je trouve très intéressant.Araignée a écrit:Pas par moi, j'espère ? Parce que même si je suis assez virulente sur ce sujet qui me touche particulièrement (avec d'autres, comme la discrimination envers les UD par exemple), je suis vraiment pas quelqu'un d'agressif, avec qui que ce soit. Donc j'espère que tu n'as pas mal interprété mes messages...LuxLisbon a écrit:Je me suis moi-même sentie agressée après mon premier message qui n'avait pourtant rien d'agressif.
Je vois ce que tu veux dire, mais ce genre d'interrogations vaut aussi pour les relations sexuelles non-tarifées. Comment savoir si telle fille, tel mec accepte telle proposition sexuelle par choix, par goût, par envie, ou parce que ça lui permet de revivre un traumatisme, de combler un manque affectif, etc ? Je sais bien qu'il est probablement plus rare de tomber sur une personne psychologiquement fragile dans le cadre d'une relation "normale" que dans le cadre d'une relation tarifée, mais le problème c'est que si on commence à poser la question en ces termes, alors il faut la poser pour toutes les formes de rapport sexuel.Araignée a écrit:On est bien d'accord. Qu'une femme refuse tout rapport sexuel, qu'elle couche avec qui elle le souhaite ou qu'elle se fasse payer pour qu'on la baise, ne change rien (ou plutôt ne devrait rien changer) à sa dignité, à son humanité, à sa valeur.
C'est bien vis-à-vis des clients que, par contre, mon avis diverge : qu'un homme (ou une femme, même si elles sont rares) achète un service sexuel, qu'il obtienne le droit de baiser un(e) parfait(e) inconnu(e) sans se préoccuper ou à minima sans avoir aucun moyen de savoir si cet(te) inconnu(e) est un(e) esclave ou une personne en état de grande détresse psychologique, que des hommes puisse considérer que leur envie de se décharger sexuellement passe avant l'intégrité psychique et l'humanité de quelqu'un, c'est ça, qui est condamnable éthiquement. S'il n'y avait que des putes libres, bien dans leur tête, heureuses de faire ce qu'elles font et y prenant du plaisir, on n'aurait effectivement pas à se mêler de ça. Sauf que les putes vraiment libres, sont des exceptions (qui existent, je ne le nie pas).
Je suis effectivement gênée à l'idée qu'on aille profiter d'une prostituée qui parle à peine français et qui vend ses services pour 10, 20€ près du périph'. Là, pour le coup, on est dans l'annihilation totale de l'autre, qui n'existe plus. Mais ceux qui font appel à des escorts n'ont à mon sens pas du tout la même démarche intellectuelle, parce qu'ils acceptent de payer un prix élevé pour la chose, et parce qu'il est alors plus fréquent d'y rencontrer des personnes travaillant de manière indépendante.
Là encore, je n'aime pas jeter la pierre : je sais que j'achète des vêtements fabriqués par des enfants, je sais que je mange de la nourriture produite de manière totalement anti-écologique et ne respectant pas les droits des animaux... Même si j'essaie de faire attention, il y a toujours un moment où l'argument financier pèsera plus lourd.
On me dira qu'aller voir une prostituée, ce n'est pas aussi essentiel que de se nourrir ou de s'habiller — mais est-ce essentiel d'avoir un iPhone fabriqué en Chine ?... Pourtant, tout le monde le fait. Et personne ne s'insurge.
Je comprends ce que tu veux dire, concernant le côté éthique de la loi. Faire peser le délit sur les clients, pas sur les prostituées. Sauf qu'il y a quand même pas mal de prostituées qui s'opposent à cette loi : pourquoi, à ton avis ? Parce qu'elles savent qu'elles devront se plier aux nouvelles exigences mises en place par cette loi : se cacher davantage, voire se poster près des frontières, etc.Araignée a écrit:Non, parce que la loi donne aussi le ton éthique d'une société. Si la loi affirme que les prostituées sont des délinquantes, dans l'esprit des gens, elles le sont (et c'est pour ça que je maudis cette fichue loi sur le racolage). Alors que si la loi affirme qu'elles sont des victimes et qu'on doit les aider comme telles, cela influera (pas d'un coup, mais petit à petit) la perception que monsieur tout le monde aura de ces femmes (et hommes).
Alors certes, pénaliser les clients aura des conséquences pour les prostituées (moins de clients, par exemple). C'est pour ça à mon avis qu'il faut absolument que ce soit accompagné d'une vraie campagne d'aide aux prostituées, et aussi d'éducation de la population à la violence que représente (dans la majorité des cas) la prostitution.
Mais on ne peut pas dire que pénaliser les prostituées ou pénaliser les clients revient au même. Ce serait un peu comme de dire que pénaliser les violeurs serait la même chose que faire un délit pour les victimes de viols, et que si on ne condamnait pas le fait de violer, les viols ne seraient pas cachés, et du coup les victimes de viols seraient plus visibles, moins isolées et moins fragilisées
Ceci dit, la pénalisation des clients touchera surtout les plus visibles, ceux qui vont voir des prostituées de rue, et moins ceux qui vont voir des escorts. Or les prostituées de rue, sont je pense plus vulnérables, et bien plus souvent victimes de la traite, que les escorts. Les tarifs étant beaucoup moins élevés (40 euros la passe dans la rue), elles sont la plupart du temps obligées d'enchaîner les passes (10, 20 par soir... comment peut-on penser que cela n'a aucune influence sur leur psychisme et leur sexualité ?), elles sont plus facilement enclines à accepter des rapports non protégés (parce que ces andouilles de clients, surtout ceux qui n'ont pas connu les années Sida, c'est à dire les moins de 35 ans, payent plus cher si on accepte de le faire sans condom), elles peuvent moins facilement refuser des pratiques qui leur déplaisent. Bref, quand une prostituée déclare qu'elle exerce cette activité librement, qu'elle y gagne bien sa vie, qu'elle n'a pas subi de traumatismes sexuels, que c'est elle qui gère comment se passe la rencontre, c'est la plupart du temps une escort (même si des escorts victimes de la traite ou vulnérables, y en a aussi un paquet). Or, ce qu'il se passe dans un appartement privé ou même un hôtel, est bien moins visible que ce qu'il se passe dans la rue. Et ce qu'il se passe dans la rue, c'est glauque, et que des gars soient prêts à payer pour participer à cette horreur, ben je trouverais ça plus que normal que la loi leur dise que non, ce n'est pas acceptable.
En fait, le problème, c'est qu'on n'abolira pas la prostitution. Du coup, j'avoue, je ne vois pas bien l'intérêt d'essayer de lutter contre les acteurs qui font la prostitution : les prostituées et leurs clients. Tout le reste autour, les proxénètes, les réseaux, ça c'est effectivement une plaie qu'il faut soigner, éradiquer. Mais la prostitution (qui passe forcément par l'existence de clients) ne sera jamais abolie. Parce qu'elle existe depuis la nuit des temps, et parce que le pouvoir du sexe est bien trop fort pour qu'on puisse le réglementer.
J'ai peut-être un côté trop pragmatique mais je n'aime pas l'idée qu'on veuille abolir ce qui ne le sera de toute manière jamais. On peut revenir dans un siècle, je pense que les choses n'auront pas changé : la prostitution existera toujours, même en Suède.
Qu'on veuille venir en aide aux victimes de ce système, je trouve cela très bien. Mais même si ces personnes-là ne sont pas les plus nombreuses, il y en a qui ne sont pas des victimes, dont le choix est réfléchi. Je trouve aberrant de vouloir rendre aussi compliqué l'exercice de leur métier. Je vais faire un parallèle qui semblera peut-être douteux à certains mais : on n'abolit pas le commerce car certains font du marché noir ; on n'abolit pas l'industrie du luxe parce que certains font des contrefaçons ; on n'arrête pas de produire des films et de la musique parce que certains permettent le téléchargement illégal.
Je sais que la mafia, les réseaux, l'esclavage ont gangrené la prostitution. Mais en voulant éradiquer la prostitution, tout court, on risque de permettre aux réseaux de travailler davantage dans l'obscurité, la clandestinité. Je ne vois pas pourquoi une politique réglementariste ne pourrait pas être plus contrôlée que celle des Pays-Bas ou de l'Allemagne : si on s'en donnait les moyens, on pourrait envoyer régulièrement des personnes vérifier la santé des prostituées, savoir si elles sont là de leur propre chef ou non, connaître leur identité, etc.
Cela demande des moyens, c'est sûr, mais cela va demander des moyens d'aller verbaliser du client, aussi...
Je suis vraiment horrifiée que tu aies vécu tout cela.Araignée a écrit:Je n'ai jamais été une esclave, je n'ai jamais eu de mac. Pourtant, le sentiment d'avoir perdu mon humanité, je sais ce que c'est. Vomir presque tout ce que je mangeais, m'évanouir quand je marchais, ou avoir tellement mal au ventre que je ne pouvais plus marcher, être totalement incapable de parler à mes amis (je venais chez eux, je disais bonjour, je passais parfois l'après-midi entière chez eux, sans pouvoir dire un mot de plus, et s'ils essayaient de me faire parler, je bégayais et paniquais mais je n'y arrivais pas. Parce que la seule chose que j'aurais voulue dire, était indicible), se sentir comme un fantôme, un mort-vivant, c'était ça, pour moi, la prostitution. Un état où j'étais si faible psychiquement que non, toute seule, j'aurais jamais pu en sortir, je n'avais pas la force. Je pouvais juste continuer à m'enfoncer, inexorablement, dans la tombe que j'étais en train de me creuser (jusqu'à ce qu'un ami me sorte de là).
Quand à refuser des pratiques, quand tu es seule avec un client, un parfait inconnu qui dans sa tête a acheté le droit à ce que tu ne lui refuses rien, refuser une pratique t'expose à te faire cogner la tronche.
Et les tarifs, pareil. Tu penses à l'escorting, là. Dans la rue, c'est 40 euros la passe, 20 la pipe. A la limite, tu peux demander 5 ou 10 euros de plus. Le jour où, voulant me débarrasser d'un type insistant et que je ne sentais pas, je lui ai demandé 200 euros dans l'espoir qu'il laisse tomber, j'ai fini évanouie dans un terrain vague, violée pendant que j'étais inconsciente, la tronche en sang et une dent en moins... (et j'ai même pas eu un centime. Et en prime j'ai du traverser la moitié de la ville dans un quartier craignos, seule à 4 heures du matin, sans savoir exactement où j'étais, à part vaguement la direction où je devais aller, avec la douleur lancinante dans la bouche, sur le visage et dans le ventre).
Mais je crois dur comme fer que si tu avais eu un vrai statut, un endroit pour exercer, avec sécurité à la clé, tu n'aurais pas eu ces mésaventures.
Ton rapport à ton propre corps, c'est autre chose : je comprends tout à fait que la prostitution soit vécue comme une violence que l'on s'inflige. C'est quelque chose d'atroce quand on le fait contre son gré.
Mais les agressions, en revanche, pourraient être évitées si on avait des endroits semblables aux maisons closes.
La pulsion autodestructrice, comme je l'ai dit plus haut, c'est un terrain sur lequel je préfère ne pas aller : la sexualité, même sans question de tarification, a parfois un côté sombre qui fait qu'on en arrive à faire des choses pour des raisons qui n'ont rien à voir avec le sexe et le plaisir. Même sans se prostituer, une femme qui veut se faire du mal se fera du mal.Araignée a écrit:Mais comment il le sait, le client, si la fille qu'il paye est indépendante, si c'est son choix ? Puisque jamais, une femme prise dans un réseau ne l'avouera à ses clients, et puisque jamais, une femme qui se prostitue par pulsion autodestructrice, ne l'avouera non plus ? Comment il sait que la femme qu'il paye, fait partie du petit pourcentage qui le vit vraiment bien ?
C'est un peu beaucoup la roulette russe, ce truc, quoi... Je te tire une balle dans la tête, mais comme une balle sur six est à blanc et que c'est celle-là qui est sortie, ben il n'y avait pas de mal à ce que je te tire dans la tête.
Il est vrai que c'est très compliqué de savoir qui est indépendant, qui ne l'est pas. Je pense que la démarche d'aller chercher une escort est déjà bien différente de celle d'aller trouver une fille dans la rue.
Néanmoins, je me répète, mais des maisons closes avec contrôles fréquents permettraient justement de savoir que la personne prostituée est libre de son choix. Après, il y aura peut-être encore des réseaux et des personnes qui se vendent dans la rue, mais alors il n'y aurait plus aucun doute possible dans la tête des clients : ces personnes-là seront des esclaves, et je n'aurai aucun problème à ce qu'on pénalise ceux qui vont voir des filles qui ne sont pas "légales".
(Je parle de maison close mais la chose peut se penser différemment, je n'ai pas réfléchi aux différentes solutions ; disons que je serai favorable à un statut de prostituée clairement défini et surtout, contrôlé, avec une surveillance des personnes qui se prostituent pour qu'elles ne soient pas agressées.)
La sexualité, c'est très intime, mais justement : nous n'avons pas tous le même rapport à notre intimité. J'ai souvent pensé, lors de rapports sexuels ratés, que je préférais que le mec touche mon corps plutôt que mon visage...Araignée a écrit:D'une part, la sexualité c'est quand même quelque chose de bien plus intime, en principe, que ce qui est en jeu dans bien des boulots. La comparaison "louer son sexe c'est comme louer ses bras", c'est vachement étrange. Parce que si on va par là, un inconnu qui me touche le sexe, je devrais le vivre de la même façon que s'il m'avait juste touché le bras... et si quelqu'un me viole, je ne devrais pas plus mal le vivre que s'il m'avait juste serrée dans ses bras ?
Je trouve tout à fait normal que la loi ait établi une différence entre l'agression physique et l'agression sexuelle. Il n'en reste pas moins que, si une personne ressent que son sexe n'est pas quelque chose de sacré, et qu'elle peut donc le partager sans que ça la bouleverse, je ne vois pas pourquoi elle en serait empêchée. C'est la simple question de savoir si on peut ou non décider de ce qu'on fait de notre propre corps, et je crois que c'est un principe fondamental pour l'émancipation des hommes et des femmes : notre corps nous appartient, et on peut donc en faire ce qu'on veut.
(Pour la réflexion sur le monde du travail, je pense avoir répondu à quelqu'un d'autre au début de mon message.)
Je pense qu'il y aura toujours des idiots capables de demander : "c'est combien ?" à une femme, parce qu'ils s'imaginent que c'est une manière de la dégrader ou de prendre le pouvoir sur elle. Sauf qu'une femme qui décide elle-même ce qu'elle fait de son corps, qui décide du tarif, qui décide qui, quand, comment, ce n'est pas une femme qui se laissera impressionner par le "c'est combien" d'un petit coq probablement mal à l'aise avec sa virilité pour en arriver là.pierregr a écrit:Sinon, que penses-tu de la phrase "c'est combien ?" que doivent se farcir les femmes à cause de la prostitution ? Trouves-tu que cette phrase est logique, anodine ou au contraire, violente ? Crois-tu que le réglementarisme va régler ce problème ou l'amplifier ?
Cette phrase n'est pas logique parce que, dans l'inconscient collectif, il n'y a rien de plus bas que de vendre son corps. Permettons à la prostituée de retrouver sa dignité, et alors là on verra que les "c'est combien" n'auront plus la même résonance — voire n'existeront plus.
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Re: La prostitution n'est pas un métier
25.05.13 3:18
Effectivement, on n'a aucun jugement à porter sur les personnes prostituées, ni sur qui que ce soit ne faisant de mal à personne ou qu'à soi-même (et tandis que je dis ça, je repense à la phrase de mon psy que quelqu'un qui se reconnaîtra m'a si gentiment rappelée, quand je portais un jugement sur moi-même en tant que pute, et qu'il m'a demandé si je pensais vraiment ça des putes, histoire que je réalise que la dignité que j'accordais sans aucun souci aux autres, j'avais droit à la même )LuxLisbon a écrit:je n'ai pas de jugement à porter sur les personnes qui préfèrent faire quelques passes par semaine plutôt qu'aller pointer tous les matins au boulot.
Ben justement, je pense qu'il est important, en fait, de se poser ce genre de questions lors de rapports sexuels (surtout vis à vis des traumatismes dus aux abus sexuels. Le manque affectif, c'est quand même beaucoup moins grave), avec qui que ce soit.LuxLisbon a écrit:Je vois ce que tu veux dire, mais ce genre d'interrogations vaut aussi pour les relations sexuelles non-tarifées. Comment savoir si telle fille, tel mec accepte telle proposition sexuelle par choix, par goût, par envie, ou parce que ça lui permet de revivre un traumatisme, de combler un manque affectif, etc ? Je sais bien qu'il est probablement plus rare de tomber sur une personne psychologiquement fragile dans le cadre d'une relation "normale" que dans le cadre d'une relation tarifée, mais le problème c'est que si on commence à poser la question en ces termes, alors il faut la poser pour toutes les formes de rapport sexuel.
Mais on devrait s'insurger ! Et non, tout le monde ne le fait pas... Mes parents m'ont élevée sous le seuil de pauvreté, mais ils ont toujours fait attention à l'impact éthique de leurs achats (donc être pauvre n'est pas incompatible avec le fait de ne pas acheter de vêtements fabriqués par des esclaves, de privilégier les produits du commerce équitable, etc). Et je suis toujours sous le seuil de pauvreté, mais je fais gaffe à ça, tout le temps (même si je ne suis pas parfaite. Je ne suis pas végane par exemple - pas encore en tout cas - mais si j'achète des œufs, c'est soit sur le marché, à un paysan, ou en dernier recours, des œufs fermiers au supermarché, mais jamais de poules en batterie ni "élevées en plein air", appellation qui recouvre une réalité bien moins plein air qu'elle en a l'air).LuxLisbon a écrit:Là encore, je n'aime pas jeter la pierre : je sais que j'achète des vêtements fabriqués par des enfants, je sais que je mange de la nourriture produite de manière totalement anti-écologique et ne respectant pas les droits des animaux... Même si j'essaie de faire attention, il y a toujours un moment où l'argument financier pèsera plus lourd.
On me dira qu'aller voir une prostituée, ce n'est pas aussi essentiel que de se nourrir ou de s'habiller — mais est-ce essentiel d'avoir un iPhone fabriqué en Chine ?... Pourtant, tout le monde le fait. Et personne ne s'insurge.
Je crois qu'en fait il est important de se rappeler que toute révolution commence par soi, que chacun de nos gestes a un impact, que l'éthique est une valeur supérieure au confort, à la facilité, à la soif de pouvoir... et à l'envie de baiser, aussi.
Bien sûr qu'on n'abolira pas totalement la prostitution. Mais l'abolition a pour but de la réduire au maximum (en nombre de prostituées). Parce que (chiffres au pif, hein) 10 000 esclaves sexuelles, c'est toujours moins pire que 100 000. Et 10 000 femmes qui se prostituent pour s'auto-détruire, c'est aussi moins pire que 100 000.LuxLisbon a écrit:En fait, le problème, c'est qu'on n'abolira pas la prostitution. Du coup, j'avoue, je ne vois pas bien l'intérêt d'essayer de lutter contre les acteurs qui font la prostitution : les prostituées et leurs clients. Tout le reste autour, les proxénètes, les réseaux, ça c'est effectivement une plaie qu'il faut soigner, éradiquer. Mais la prostitution (qui passe forcément par l'existence de clients) ne sera jamais abolie. Parce qu'elle existe depuis la nuit des temps, et parce que le pouvoir du sexe est bien trop fort pour qu'on puisse le réglementer.
Je ne vais pas reprendre l'exemple de l'esclavage, mais y a des tas de choses qui existent depuis la nuit des temps, qu'on a interdites, mais qui existent quand même. Le meurtre par exemple, on ne l'abolira jamais (et il existe sans doute depuis bien longtemps que la prostitution, en fait !) Pourtant, personne ne se dit qu'il faut être pragmatique et cesser de l'interdire. Le viol, idem.
Ben je ne vois pas comment la France pourrait arriver à faire ce qu'aucun pays réglementariste n'a réussi (il n'y a pas que les Pays-Bas et l'Allemagne. Il y a aussi l'Espagne, la Suisse...). Dans tous ces pays, les réseaux s'infiltrent en masse, favorisés par la politique réglementariste qui leur permet d'avoir plus de clients, de placer leurs filles dans des structures, etc.LuxLisbon a écrit:Je ne vois pas pourquoi une politique réglementariste ne pourrait pas être plus contrôlée que celle des Pays-Bas ou de l'Allemagne : si on s'en donnait les moyens, on pourrait envoyer régulièrement des personnes vérifier la santé des prostituées, savoir si elles sont là de leur propre chef ou non, connaître leur identité, etc.
Cela demande des moyens, c'est sûr, mais cela va demander des moyens d'aller verbaliser du client, aussi...
Quand aux vérifications de la santé des prostituées, si on regarde ce qu'il se passe dans ces pays réglementaristes, cette vérification de la santé a en fait des contours ignobles : les maisons closes proposent toutes des pratiques à risques (à minima, la fellation sans capote, qui est très peu à risques pour le client, mais très à risques pour celle qui suce... bien que moins qu'un rapport vaginal). Donc, que ces filles soient exposées au VIH, aux hépatites, à a syphilis, en fait, ces maisons closes s'en foutent (sinon ces pratiques à risques ne seraient pas sur leur carte).
Parallèlement, les filles travaillant en maison closes sont soumises régulièrement à des tests de dépistage. Sauf que quand on fait un test et qu'on découvre qu'on est séropo, c'est trop tard. La maison close éconduit alors la prostituée, parce que la santé qui est protégée, c'est pas la leur, mais celle des clients. Clients auxquels on ne demande jamais de tests de dépistage pour avoir le droit d'entrer et consommer...
Sauf qu'en fait, même si elle passe par quelque chose qui ressemble à de la sexualité parce qu'issue de quelque chose qui y ressemble aussi sans en être (les agressions sexuelles), cette pulsion auto-destructrice n'est pas de la sexualité. C'est plus quelque chose de l'ordre du quasi suicide, de l'annihilation de soi, de l'auto-mutilation mais sans le soulagement qu'on peut trouver dans l'auto-mutilation.LuxLisbon a écrit:La pulsion autodestructrice, comme je l'ai dit plus haut, c'est un terrain sur lequel je préfère ne pas aller : la sexualité, même sans question de tarification, a parfois un côté sombre qui fait qu'on en arrive à faire des choses pour des raisons qui n'ont rien à voir avec le sexe et le plaisir. Même sans se prostituer, une femme qui veut se faire du mal se fera du mal.
Qu'un client paye pour ça, ça me fait un peu l'effet de quelqu'un qui aurait des goûts de torture, et qui payerait une femme prête à se faire torturer tellement ses traumatismes ont attisé la haine de soi. Et l'idée qu'on puisse ouvrir des maisons closes, ça me fait donc l'effet de maisons où des gens viendraient pratiquer la torture sur d'autres "apparemment" consentants.
Et quand même, contrairement aux rapports sexuels non tarifés, dans la prostitution, on parle quand même de 60 à 90% de prostituées ayant été victimes d'abus sexuels dans l'enfance, donc une bonne majorité.
Et tu ne penses pas qu'avec la stigmatisation qui entoure la prostitution - et qui ne disparaît absolument pas dans les pays réglementaristes - le fait de ficher les prostituées à vie en leur donnant un statut bien défini et contrôlé, risquerait de les stigmatiser encore plus et de les empêcher de changer d'activité ? Parce que moi, je peux toujours dire que j'ai fait la manche pendant toutes ces années, mais si j'avais été fichée, contrôlée, ce serait inscrit dans des dossiers (sociaux, par exemple), et au lieu de choisir avec précaution à qui je veux en parler, ben des gens seraient facilement au courant sans que je l'ai souhaité...LuxLisbon a écrit:(Je parle de maison close mais la chose peut se penser différemment, je n'ai pas réfléchi aux différentes solutions ; disons que je serai favorable à un statut de prostituée clairement défini et surtout, contrôlé, avec une surveillance des personnes qui se prostituent pour qu'elles ne soient pas agressées.)
Notre corps ne nous appartient pas, notre corps, c'est nous. Il représente quand même notre intégrité physique, intimement lié à notre intégrité psychique. Et non, quelque part, on ne peut pas laisser tout le monde faire tout ce qu'il veut de son corps (pas dans une société éthique qui protège les plus vulnérables). On ne peut pas laisser les plus pauvres d'entre les pauvres vendre un de leurs organes au péril de leur vie, avec des conséquences graves sur leur santé. On en peut pas laisser les gens qui sont dans une période difficile de leur vie ôter la vie à leur corps sans rien faire. On ne peut pas laisser les gens se suicider, se mutiler gravement, sans réagir. C'est de la non assistance à personne en danger.LuxLisbon a écrit:C'est la simple question de savoir si on peut ou non décider de ce qu'on fait de notre propre corps, et je crois que c'est un principe fondamental pour l'émancipation des hommes et des femmes : notre corps nous appartient, et on peut donc en faire ce qu'on veut.
J'ai longtemps eu du mal, par exemple, avec la notion de soin psychiatrique sous contrainte, quand quelqu'un est dangereux pour lui-même ; mais en fait, ce soin sous contrainte est parfois nécessaire, le temps que la personne sorte de l'état de crise aiguë (même si j'ai toujours du mal avec la façon dont ce soin sous contrainte peut être exercé, je pense par exemple qu'en hôpital psy on oublie trop souvent que même sous contrainte, le patient a, c'est dans la loi, un droit de regard et de discussion à propos de son traitement).
- GruntBanni·e
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Re: La prostitution n'est pas un métier
25.05.13 3:23
Tu es au courant que le STRASS s'oppose à cette vision réglementariste, car elle supposerait un contrôle de l'état sur la vie des prostitué-e-s ?Néanmoins, je me répète, mais des maisons closes avec contrôles fréquents permettraient justement de savoir que la personne prostituée est libre de son choix.
Et donc, probablement, le cortège de merde qui va avec : ne vous droguez pas, allez chez tel médecin, faites ceci/cela, sinon on vous interdit d' "exercer"..
En fait j'ai l'impression que le réglementarisme consiste à transférer une partie du pouvoir des clients, des proxénètes, des réseaux, vers l'état. Et pas à le rendre aux prostituées.
Dans le même esprit que la loi sur le voile : "Faites ce que la République vous dit, pas ce que votre mari ou frère vous dit." (et donc, ne faites pas ce que vous voulez).
Dans l'hypothèse d'une "non lutte" contre la prostitution, est-ce qu'on ne pourrait pas envisager que le rôle de l'état soit de secourir, de proposer de l'aide, de tendre la main, d'assister, sans forcément mettre en place une contrepartie sous forme de sanction ou de contrôle envers les prostituées ou les clients ? Bref, acter du fait que la prostitution est majoritairement une situation de détresse, donc venir en aide aux personnes potentiellement en détresse ?
Quand on appelle les urgences, ils ne commencent pas par demander "Qui vous a blessé ?" ou "Avez vous respecté les règles de sécurité ?". Ils viennent, tout simplement.
Re: La prostitution n'est pas un métier
25.05.13 9:29
luxlisbon a écrit:Je pense qu'il y aura toujours des idiots capables de demander : "c'est combien ?" à une femme, parce qu'ils s'imaginent que c'est une manière de la dégrader ou de prendre le pouvoir sur elle. Sauf qu'une femme qui décide elle-même ce qu'elle fait de son corps, qui décide du tarif, qui décide qui, quand, comment, ce n'est pas une femme qui se laissera impressionner par le "c'est combien" d'un petit coq probablement mal à l'aise avec sa virilité pour en arriver là.
Cette phrase n'est pas logique parce que, dans l'inconscient collectif, il n'y a rien de plus bas que de vendre son corps. Permettons à la prostituée de retrouver sa dignité, et alors là on verra que les "c'est combien" n'auront plus la même résonance — voire n'existeront plus.
Euh non, ce ne sont pas des idiots qui posent cette question : ce sont des hommes à qui "on" a inculqué depuis leur enfance qu'une femme a un prix. Le problème est sociétal, pas individuel. C'est parce qu'il y a des "corps à vendre" que des hommes se permettent de dire ça et cela n'a rien à voir avec la dignité des personnes prostituées. C'est pour moi une question féministe avant tout et c'est phrase est tout à fait logique, d'un point de vue patriarcal : la maman ou la putain
Sinon, je suis surpris que tu n'aies pas relevé ma remarque émanant de l'émission "envoyé spécial" sur l'incapacité de "tuer" les réseaux et les mafias. Le Strass et tous les pro-prostitution chantent en coeur "faut lutter contre les méchants réseaux et les vilains proxos, donnons-nous les moyens". On dirait Oui-Oui au pays des Bisounours.
Il n'y a AUCUN moyen d'éradiquer les mafias et les réseaux car ils se protègent de toutes les façons dans des pays sans coopération policière avec l'Europe Occidentale. Le BRP avoue son impuissance face aux mafias, les hôtels en France sont d'ailleurs complices car parmi leur clientèle, il y a toute une série de femmes qui louent des chambres (65€ la journée à la porte Maillot si je me souviens bien) et cela, la direction de l'hôtel le sait mais ne fait rien, ça leur rapporte trop de fric. Or, ces femmes sont dans des réseaux mais elles ne connaissent même pas l'interlocuteurice IRL, tout est virtuel. La seule solution est de pénaliser les clients mais aussi les intermédiaires (hôtels, entre autres). Et celles qui voudront se prostituer malgré l'abolition trouveront toujours des clients, je ne m'inquiète pas du tout pour elles.
Sinon, ta remarque sur l'Iphone m'a fait sursauter. Si on me donne un Iphone gratis, je le casse direct à coups de marteau. Je conch*e Apple, cette marque de m*de qui utilise des esclaves et qui rend les gens captifs de ses produits vu qu'ils ne sont compatibles qu'entre eux.
Je vis avec une moyenne de mille € par mois dans une logique de simplicité volontaire et même si je trouve normal que d'autres gens aient envie de plus de fric, je suis la preuve vivante que cette obsession d'avoir les derniers produits à la mode ou celle d'accumuler du fric n'est pas un but en soi.
Donc il est possible vivre en essayant le plus possible de ne pas acheter de produits fait par des esclaves. Et encore, je dirais que les consommateurices ont l'excuse de ne pas être sûr-e-s de la façon dont les produits sont fabriqués mais le client qui est les yeux dans les yeux avec la prostituée, comment peut-il faire semblant d'ignorer qu'il y a 90% de chances qu'il a affaire à une personne contrainte ? Quand on lit les forums de clients, on voit bien que la plupart n'en ont rien à tref de tout ça. C'est pour ça qu'il faut les pénaliser, ils exploitent sciemment la faiblesse de la plupart de ces femmes, ce sont des esclavagistes, purs produits du néolibéralisme qui revendique "la liberté de disposer du corps des autres"
Edit : Le merveilleux monde des maisons closes en Suisse, pays "propre sur lui"
- Spoiler:
- Du sexe à gogo pour appâter les clients
Un nombre croissant de lupanars proposent monts et merveilles pour un prix fixe. Une tendance «inquiétante», selon plusieurs experts.
Un nouveau concept fait son apparition dans les bordels suisses. Le «flatrate-sex» permet aux clients de coucher avec autant de femmes qu’ils veulent pour un prix forfaitaire. Inquiète, l’avocate zurichoise Silvia Steiner, spécialisée dans la traite d’humains, constate que le nombre d’établissements proposant cette offre ne cesse d’augmenter.
Un bordel de Dübendorf (ZH) appâte ainsi ses clients avec le slogan suivant: «Jusqu’à 60 filles par jour pour un prix fixe de 160 fr., repas compris.» Pour 300 fr. les deux heures, un autre établissement dans le canton de Thurgovie promet du «sexe à discrétion» tous les mercredis, samedis et dimanches. Un gérant d’une maison close, souhaitant rester anonyme, affirme que le «flatrate-sex» est très rentable: «On ne le proposerait pas si ça ne marchait pas. En plus, les hommes se surestiment. Souvent, ils ne couchent pas avec plus de deux femmes.»
Le nouveau concept en vogue ne plaît pas à Rebecca Angelini, porte-parole du centre d’assistance aux victimes de la traite des femmes (FIZ): «C’est totalement irrespectueux envers les prostituées. Ça pourrait devenir dangereux si les femmes ne
peuvent plus refuser de clients. Elles doivent avoir le choix, avec ou sans forfaits fixes.»
En Allemagne, le phénomène sexe à gogo existe depuis plusieurs années. De grands débats ont lieu actuellement pour savoir s’il faut interdire ce concept.
http://www.20min.ch/ro/news/suisse/story/Du-sexe-a-gogo-pour-app-ter-les-clients-13187291
Re: La prostitution n'est pas un métier
25.05.13 10:56
A lire aussi sur les merveilleuses maisons closes en Suisse où tout est rose bonbon: Marché du sexe et violences à Génève
Et je pense que cet article explique bien les raisons qui pour moi nécessitent d'abolir la prostitution (quels que soient les moyens déployés pour ça):
Le client est roi
Edit: je viens de tomber sur ceci
http://sante.planet.fr/a-la-une-mesdames-voila-l-astuce-pour-obtenir-ce-que-vous-voulez-de-votre-homme.356456.2035.html
Franchement que doit-on en penser en tant que féministes… Est-ce que le sexe doit vraiment être une monnaie d'échange? Rien de patriarcal là-dedans? (et pas la peine de me parler du nombre statistiquement insignifiant de femmes qui achètent du sexe, c'est comme les gens qui parlent de femmes qui violent des hommes pour démontrer que le viol n'a rien à voir avec le patriarcat)…
Et je pense que cet article explique bien les raisons qui pour moi nécessitent d'abolir la prostitution (quels que soient les moyens déployés pour ça):
Le client est roi
Edit: je viens de tomber sur ceci
http://sante.planet.fr/a-la-une-mesdames-voila-l-astuce-pour-obtenir-ce-que-vous-voulez-de-votre-homme.356456.2035.html
Franchement que doit-on en penser en tant que féministes… Est-ce que le sexe doit vraiment être une monnaie d'échange? Rien de patriarcal là-dedans? (et pas la peine de me parler du nombre statistiquement insignifiant de femmes qui achètent du sexe, c'est comme les gens qui parlent de femmes qui violent des hommes pour démontrer que le viol n'a rien à voir avec le patriarcat)…
- LuxLisbon—
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Re: La prostitution n'est pas un métier
25.05.13 13:32
On en revient à mon exemple de la jeune fille qui aime être fessée voire brutalisée à cause de son passé. Qu'est-ce qu'on fait ? On l'empêche de prendre du plaisir ? Son potentiel partenaire sexuel fait une recherche sur son passé pour savoir si ses envies sont saines, ou malsaines ?Araignée a écrit:Ben justement, je pense qu'il est important, en fait, de se poser ce genre de questions lors de rapports sexuels (surtout vis à vis des traumatismes dus aux abus sexuels. Le manque affectif, c'est quand même beaucoup moins grave), avec qui que ce soit.
N'importe quel désir sexuel est lié à ce qu'on a vécu. Et je crois que si la sexualité se passe sur le mode du consentement mutuel, il n'y a pas de raison pour qu'on décide ce qui est mal ou ce qui ne l'est pas.
Certes. Je n'ai pas dit que personne ici (puisqu'un autre est venu me répondre en disant : "je conchie Apple") ne faisait attention à ses achats.Araignée a écrit:Mais on devrait s'insurger ! Et non, tout le monde ne le fait pas... Mes parents m'ont élevée sous le seuil de pauvreté, mais ils ont toujours fait attention à l'impact éthique de leurs achats (donc être pauvre n'est pas incompatible avec le fait de ne pas acheter de vêtements fabriqués par des esclaves, de privilégier les produits du commerce équitable, etc). Et je suis toujours sous le seuil de pauvreté, mais je fais gaffe à ça, tout le temps (même si je ne suis pas parfaite. Je ne suis pas végane par exemple - pas encore en tout cas - mais si j'achète des œufs, c'est soit sur le marché, à un paysan, ou en dernier recours, des œufs fermiers au supermarché, mais jamais de poules en batterie ni "élevées en plein air", appellation qui recouvre une réalité bien moins plein air qu'elle en a l'air).
Je crois qu'en fait il est important de se rappeler que toute révolution commence par soi, que chacun de nos gestes a un impact, que l'éthique est une valeur supérieure au confort, à la facilité, à la soif de pouvoir... et à l'envie de baiser, aussi.
Mais je suis persuadée qu'en allant chez chacun de vous, je trouverais des produits fabriqués de manière abusive. Qu'il s'agisse de vêtements, de nourriture, de produits technologiques, etc. Parce qu'il est impossible de faire attention à tout, parce que parfois on n'a pas d'offre alternative, parce que parfois on n'a pas les moyens d'acheter éthique.
Je suis comme vous, je fais attention à ce que j'achète (et je mange les oeufs de mes poules, par exemple), j'essaie d'aller cher des producteurs, d'acheter des vêtements fabriqués en Europe, mais je sais qu'il m'arrive de déroger. Voilà tout.
Et la société toute entière est la première à s'émouvoir du sort des prostituées, en fermant les yeux sur les 3/4 des produits mis en rayon dans les supermarchés. Le gouvernement nous fait la bonne morale, à base de "on va abolir la prostitution", sans songer une seule seconde à refuser les importations venues de Chine, par exemple. Ce n'est pas mon idée d'une société éthique et d'une politique responsable : les leçons de morale de ces gens-là, je les prendrais au sérieux quand elles ne seront pas dictées par des considérations économiques.
La prostitution ne rapporte rien à l'Etat : logique qu'il veuille légiférer dessus. En revanche, les vêtements chinois, les animaux qui passent des heures dans des camions en plein soleil sans eau, tout ça, il s'en fout.
Mais le viol et le meurtre sont des crimes. Se prostituer n'en est pas un, et n'en a jamais été un.Araignée a écrit:Bien sûr qu'on n'abolira pas totalement la prostitution. Mais l'abolition a pour but de la réduire au maximum (en nombre de prostituées). Parce que (chiffres au pif, hein) 10 000 esclaves sexuelles, c'est toujours moins pire que 100 000. Et 10 000 femmes qui se prostituent pour s'auto-détruire, c'est aussi moins pire que 100 000.
Je ne vais pas reprendre l'exemple de l'esclavage, mais y a des tas de choses qui existent depuis la nuit des temps, qu'on a interdites, mais qui existent quand même. Le meurtre par exemple, on ne l'abolira jamais (et il existe sans doute depuis bien longtemps que la prostitution, en fait !) Pourtant, personne ne se dit qu'il faut être pragmatique et cesser de l'interdire. Le viol, idem.
L'esclavage, j'ai déjà expliqué pourquoi c'était incomparable avec une situation de prostitution indépendante. L'esclavage induit l'annihilation de l'être humain ; la prostitution, non, parce qu'elle peut être un choix libre et raisonné.
Je ne vois pas pourquoi on ne peut pas imaginer un système différent chez nous. Ce n'est pas parce que ça n'a pas marché ailleurs que ça ne marcherait pas chez nous. Cela me semble être de la logique pure : réglementer ne signifie pas appliquer les mêmes règles que les pays voisins. Il y a tout un tas de choses, comme le chômage, la sécurité sociale, qui existent dans d'autres pays, mais sous des formes différentes que celles qu'on connaît chez nous.Araignée a écrit:Ben je ne vois pas comment la France pourrait arriver à faire ce qu'aucun pays réglementariste n'a réussi (il n'y a pas que les Pays-Bas et l'Allemagne. Il y a aussi l'Espagne, la Suisse...). Dans tous ces pays, les réseaux s'infiltrent en masse, favorisés par la politique réglementariste qui leur permet d'avoir plus de clients, de placer leurs filles dans des structures, etc.
Quand aux vérifications de la santé des prostituées, si on regarde ce qu'il se passe dans ces pays réglementaristes, cette vérification de la santé a en fait des contours ignobles : les maisons closes proposent toutes des pratiques à risques (à minima, la fellation sans capote, qui est très peu à risques pour le client, mais très à risques pour celle qui suce... bien que moins qu'un rapport vaginal). Donc, que ces filles soient exposées au VIH, aux hépatites, à a syphilis, en fait, ces maisons closes s'en foutent (sinon ces pratiques à risques ne seraient pas sur leur carte).
Parallèlement, les filles travaillant en maison closes sont soumises régulièrement à des tests de dépistage. Sauf que quand on fait un test et qu'on découvre qu'on est séropo, c'est trop tard. La maison close éconduit alors la prostituée, parce que la santé qui est protégée, c'est pas la leur, mais celle des clients. Clients auxquels on ne demande jamais de tests de dépistage pour avoir le droit d'entrer et consommer...
Inventons notre propre réglementation de la prostitution, en concertation avec les premiers et premières concernés.
Ce n'est pas de la sexualité, mais qui es-tu pour juger ce que font les autres, de manière libre, choisie, consentie ? Et comment pourrais-tu avoir un droit de regard là-dessus ?Araignée a écrit:Sauf qu'en fait, même si elle passe par quelque chose qui ressemble à de la sexualité parce qu'issue de quelque chose qui y ressemble aussi sans en être (les agressions sexuelles), cette pulsion auto-destructrice n'est pas de la sexualité. C'est plus quelque chose de l'ordre du quasi suicide, de l'annihilation de soi, de l'auto-mutilation mais sans le soulagement qu'on peut trouver dans l'auto-mutilation.
Qu'un client paye pour ça, ça me fait un peu l'effet de quelqu'un qui aurait des goûts de torture, et qui payerait une femme prête à se faire torturer tellement ses traumatismes ont attisé la haine de soi. Et l'idée qu'on puisse ouvrir des maisons closes, ça me fait donc l'effet de maisons où des gens viendraient pratiquer la torture sur d'autres "apparemment" consentants.
Et quand même, contrairement aux rapports sexuels non tarifés, dans la prostitution, on parle quand même de 60 à 90% de prostituées ayant été victimes d'abus sexuels dans l'enfance, donc une bonne majorité.
Il y a des pratiques extrêmes dans le monde BDSM, des suspensions, des gens qui se mutilent, etc. S'ils y prennent du plaisir, qui es-tu pour discuter de leur liberté à avoir ce genre de pratiques ?
60 à 90%... c'est quand même un chiffre extrêmement vague. Je pense qu'on peut aussi faire des enquêtes similaires dans d'autres milieux socio-professionnels, et trouver des statistiques similaires (par exemple dans les emplois très peu qualifiés et essentiellement féminins, comme le ménage : je ne serais pas surprise que les pourcentages de filles abusées sexuellement ou physiquement soient du même ordre — sauf que c'est une enquête qu'on ne fera jamais).
Je ne pensais pas à "ficher" ces femmes. Il est vrai que c'est assez problématique, mais là encore il y a des solutions qui existent. Et justement, je crois que si une personne est autant gênée à l'idée qu'on connaisse son passé de prostituée, alors c'est que ce métier n'est définitivement pas adapté pour elle...Araignée a écrit:Et tu ne penses pas qu'avec la stigmatisation qui entoure la prostitution - et qui ne disparaît absolument pas dans les pays réglementaristes - le fait de ficher les prostituées à vie en leur donnant un statut bien défini et contrôlé, risquerait de les stigmatiser encore plus et de les empêcher de changer d'activité ? Parce que moi, je peux toujours dire que j'ai fait la manche pendant toutes ces années, mais si j'avais été fichée, contrôlée, ce serait inscrit dans des dossiers (sociaux, par exemple), et au lieu de choisir avec précaution à qui je veux en parler, ben des gens seraient facilement au courant sans que je l'ai souhaité...
Là-dessus, nous ne serons jamais d'accord. J'estime que c'est la chose la plus essentielle qui soit : la liberté de disposer de son corps, sans entrave, sans réglementation. Je suis d'ailleurs tout à fait favorable au suicide, également : ce n'est pas à moi de décider qui doit rester en vie, et qui ne le doit pas.Araignée a écrit:Notre corps ne nous appartient pas, notre corps, c'est nous. Il représente quand même notre intégrité physique, intimement lié à notre intégrité psychique. Et non, quelque part, on ne peut pas laisser tout le monde faire tout ce qu'il veut de son corps (pas dans une société éthique qui protège les plus vulnérables). On ne peut pas laisser les plus pauvres d'entre les pauvres vendre un de leurs organes au péril de leur vie, avec des conséquences graves sur leur santé. On en peut pas laisser les gens qui sont dans une période difficile de leur vie ôter la vie à leur corps sans rien faire. On ne peut pas laisser les gens se suicider, se mutiler gravement, sans réagir. C'est de la non assistance à personne en danger.
J'ai longtemps eu du mal, par exemple, avec la notion de soin psychiatrique sous contrainte, quand quelqu'un est dangereux pour lui-même ; mais en fait, ce soin sous contrainte est parfois nécessaire, le temps que la personne sorte de l'état de crise aiguë (même si j'ai toujours du mal avec la façon dont ce soin sous contrainte peut être exercé, je pense par exemple qu'en hôpital psy on oublie trop souvent que même sous contrainte, le patient a, c'est dans la loi, un droit de regard et de discussion à propos de son traitement).
Maintenant, il y a des tas de personnes qui ont eu des proches qui se mutilaient, qui se droguaient, et qui ne sont pas allées "dénoncer" ces personnes aux autorités. Et en général, ils ne sont pas arrêtés ni condamnés.
La question du soin psychiatrique sous contrainte est extrêmement délicate ; beaucoup de psychiatres et de psychologues y sont d'ailleurs opposés, puisque pour eux, c'est au patient d'aller vers la thérapie. Maintenant, il y a des cas de démence où la personne n'est plus maîtresse d'elle-même, et qui peuvent nécessiter une surveillance constante. Mais ce n'est pas le cas de toutes les personnes qui se droguent, se mutilent ou veulent mourir — qu'il faut évidemment aider, si on le peut, si on en a les moyens. Mais décider pour eux ce que doit être leur vie et ce que doit être leur rapport à leur corps, non. Désolée mais sur ce sujet on ne tombera jamais d'accord.
Je suis assez d'accord avec ce que tu dis, et je ne faisais que lancer des pistes quand j'évoquais les maisons closes.Grunt a écrit:Tu es au courant que le STRASS s'oppose à cette vision réglementariste, car elle supposerait un contrôle de l'état sur la vie des prostitué-e-s ?Néanmoins, je me répète, mais des maisons closes avec contrôles fréquents permettraient justement de savoir que la personne prostituée est libre de son choix.
Et donc, probablement, le cortège de merde qui va avec : ne vous droguez pas, allez chez tel médecin, faites ceci/cela, sinon on vous interdit d' "exercer"..
En fait j'ai l'impression que le réglementarisme consiste à transférer une partie du pouvoir des clients, des proxénètes, des réseaux, vers l'état. Et pas à le rendre aux prostituées.
Dans le même esprit que la loi sur le voile : "Faites ce que la République vous dit, pas ce que votre mari ou frère vous dit." (et donc, ne faites pas ce que vous voulez).
Dans l'hypothèse d'une "non lutte" contre la prostitution, est-ce qu'on ne pourrait pas envisager que le rôle de l'état soit de secourir, de proposer de l'aide, de tendre la main, d'assister, sans forcément mettre en place une contrepartie sous forme de sanction ou de contrôle envers les prostituées ou les clients ? Bref, acter du fait que la prostitution est majoritairement une situation de détresse, donc venir en aide aux personnes potentiellement en détresse ?
Quand on appelle les urgences, ils ne commencent pas par demander "Qui vous a blessé ?" ou "Avez vous respecté les règles de sécurité ?". Ils viennent, tout simplement.
Je sais que le STRASS s'y oppose : mais j'ai un cerveau, en fait, et donc j'estime que je peux essayer de réfléchir par moi-même sur ces sujets-là.
Maintenant, comme je l'ai dit plus haut, ce que j'aimerais, c'est une sorte d'états généraux de la prostitution, mise en place par l'Etat, et dans lesquels les prostitués viendraient évoquer leur expérience et essayer de trouver un moyen de réglementer leur activité. Ce sont eux les premiers concernés...
Non, une femme n'a pas un prix ; éventuellement, un acte sexuel a un prix. Mais une femme ne se vend pas quand elle a une relation sexuelle tarifée.pierregr a écrit:Euh non, ce ne sont pas des idiots qui posent cette question : ce sont des hommes à qui "on" a inculqué depuis leur enfance qu'une femme a un prix. Le problème est sociétal, pas individuel. C'est parce qu'il y a des "corps à vendre" que des hommes se permettent de dire ça et cela n'a rien à voir avec la dignité des personnes prostituées. C'est pour moi une question féministe avant tout et c'est phrase est tout à fait logique, d'un point de vue patriarcal : la maman ou la putain
Ce n'est pas la peine de caricaturer mes propos.pierregr a écrit:Sinon, je suis surpris que tu n'aies pas relevé ma remarque émanant de l'émission "envoyé spécial" sur l'incapacité de "tuer" les réseaux et les mafias. Le Strass et tous les pro-prostitution chantent en coeur "faut lutter contre les méchants réseaux et les vilains proxos, donnons-nous les moyens". On dirait Oui-Oui au pays des Bisounours.
Je n'ai pas relevé car je n'ai pas vu ce sujet (même si je le souhaitais).
On est donc bien d'accord pour dire que la pénalisation des clients ne changera strictement rien à la réalité des réseaux et autres mafias, qui iront vendre leurs filles ailleurs s'ils ne peuvent plus le faire chez nous.pierregr a écrit:Il n'y a AUCUN moyen d'éradiquer les mafias et les réseaux car ils se protègent de toutes les façons dans des pays sans coopération policière avec l'Europe Occidentale. Le BRP avoue son impuissance face aux mafias, les hôtels en France sont d'ailleurs complices car parmi leur clientèle, il y a toute une série de femmes qui louent des chambres (65€ la journée à la porte Maillot si je me souviens bien) et cela, la direction de l'hôtel le sait mais ne fait rien, ça leur rapporte trop de fric. Or, ces femmes sont dans des réseaux mais elles ne connaissent même pas l'interlocuteurice IRL, tout est virtuel. La seule solution est de pénaliser les clients mais aussi les intermédiaires (hôtels, entre autres). Et celles qui voudront se prostituer malgré l'abolition trouveront toujours des clients, je ne m'inquiète pas du tout pour elles.
Ça, je me doutais bien que je n'allais avoir en face de moi que des gens qui consomment responsable, tout le temps, sans jamais déroger à leurs principespierregr a écrit:Sinon, ta remarque sur l'Iphone m'a fait sursauter. Si on me donne un Iphone gratis, je le casse direct à coups de marteau. Je conch*e Apple, cette marque de m*de qui utilise des esclaves et qui rend les gens captifs de ses produits vu qu'ils ne sont compatibles qu'entre eux.
Je vis avec une moyenne de mille € par mois dans une logique de simplicité volontaire et même si je trouve normal que d'autres gens aient envie de plus de fric, je suis la preuve vivante que cette obsession d'avoir les derniers produits à la mode ou celle d'accumuler du fric n'est pas un but en soi.
Donc il est possible vivre en essayant le plus possible de ne pas acheter de produits fait par des esclaves. Et encore, je dirais que les consommateurices ont l'excuse de ne pas être sûr-e-s de la façon dont les produits sont fabriqués mais le client qui est les yeux dans les yeux avec la prostituée, comment peut-il faire semblant d'ignorer qu'il y a 90% de chances qu'il a affaire à une personne contrainte ? Quand on lit les forums de clients, on voit bien que la plupart n'en ont rien à tref de tout ça. C'est pour ça qu'il faut les pénaliser, ils exploitent sciemment la faiblesse de la plupart de ces femmes, ce sont des esclavagistes, purs produits du néolibéralisme qui revendique "la liberté de disposer du corps des autres"
Il est vrai que les consommateurs ne savent pas comment les fringues et chaussures de marque type Adidas, Nike, sont fabriquées, alors que des tas de scandales ont éclaté dans les années 90... Ça n'empêche pas ces marques d'avoir toujours un énorme succès, avec des produits de qualité médiocre vendus à des tarifs prohibitifs.
Bref, je te renvoie à ce que j'ai dit plus haut : les leçons de morale de l'Etat qui choisit les sujets qui le gênent en fonction de ses intérêts économiques, je n'en veux pas. Qu'on arrête d'importer des produits fabriqués de manière indigne, qu'on arrête de produire de la viande, du lait et des oeufs de manière indigne ; et ensuite, ils pourront venir dire qu'ils sont opposés à l'esclavage et qu'ils veulent abolir la prostitution.
Re: La prostitution n'est pas un métier
25.05.13 15:18
luxlisbon a écrit:Et je crois que si la sexualité se passe sur le mode du consentement mutuel, il n'y a pas de raison pour qu'on décide ce qui est mal ou ce qui ne l'est pas.
Dérive de langage. La sexualité implique un désir MUTUEL : les 2 (ou plusieurs) partenaires se désirent mutuellement. Or, dans la prostitution, la femme cède son consentement contre de l'argent mais n'a aucun désir pour le client (elle peut néanmoins avoir du plaisir mais c'est une autre histoire).
Là-dessus, nous ne serons jamais d'accord. J'estime que c'est la chose la plus essentielle qui soit : la liberté de disposer de son corps, sans entrave, sans réglementation
Y compris de se faire prélever des organes pour acheter un Ipad ? Ou la GPA (prostitution utérine) ?
Non, une femme n'a pas un prix ; éventuellement, un acte sexuel a un prix. Mais une femme ne se vend pas quand elle a une relation sexuelle tarifée.
Tu as éludé maladroitement la question en jouant sur les mots. Que penses-tu de ceci
ce sont des hommes à qui "on" a inculqué depuis leur enfance qu'un acte sexuel a un prix.
En sachant qu'une majorité d'hommes sont hétéros, l'acte sexuel implique donc les femmes.
On est donc bien d'accord pour dire que la pénalisation des clients ne changera strictement rien à la réalité des réseaux et autres mafias, qui iront vendre leurs filles ailleurs s'ils ne peuvent plus le faire chez nous.
Je suis optimiste de nature, je vois le problème autrement. Il fallait bien qu'un pays commence (la Suède) et d'autres pays nordiques parlent d'instaurer l'abolition. Si de plus en plus de pays l'instaurent, on fera évoluer les mentalités pour que les rapports sexuels ne soient plus achetables, il faut évidemment éduquer les enfants dans le respect mutuel du corps des autres. Sans cette éducation, si la société reste sexiste, de nombreux hommes persisteront à penser que la prostitution, c'est nécessaire. A noter d'ailleurs que la plupart des personnes qui défendent ouvertement la prostitution IRL ou sur les forums sont des hommes, c'est tout sauf un hasard.
Il est vrai que les consommateurs ne savent pas comment les fringues et chaussures de marque type Adidas, Nike, sont fabriquées, alors que des tas de scandales ont éclaté dans les années 90... Ça n'empêche pas ces marques d'avoir toujours un énorme succès, avec des produits de qualité médiocre vendus à des tarifs prohibitifs.
Prenons le cas de la catastrophe au Bengla Desh : les grandes marques dont on a retrouvé des fringues dans les décombres de l'usine (photos à l'appui) disent "spanous, on a des sous-traitants mais on ne savait pas que nos vêtements étaient fabriqués au Bengla Desh". Donc même si je VEUX me renseigner sur l'origine des fringues que j'achète, je fais quoi ? Je suis obligé de croire les multinationales ou d'acheter local. Tandis que le client face à la prostituée ne peut pas faire l'hypocrite : il sait parfaitement qu'il a sans doute affaire à une esclave ou une fille sous la contrainte. Et même s'il pose la question, elle ne dira jamais la vérité : celles dans les réseaux sont menacées de mort si elles se plaignent et le client peut être un pote du proxo. Donc, elles se taisent et le client pourrait même se dire "j'ai posé la question mais elle m'a certifié ne pas être contrainte".
Bref, je te renvoie à ce que j'ai dit plus haut : les leçons de morale de l'Etat qui choisit les sujets qui le gênent en fonction de ses intérêts économiques, je n'en veux pas. Qu'on arrête d'importer des produits fabriqués de manière indigne, qu'on arrête de produire de la viande, du lait et des oeufs de manière indigne ; et ensuite, ils pourront venir dire qu'ils sont opposés à l'esclavage et qu'ils veulent abolir la prostitution.
Il est évident que les Etats sont loin d'être des exemples mais cela créerait encore une crise économique plus profonde s'ils avaient le courage de ne plus fricoter avec les dictatures ou les pays ne respectant pas les conditions de travail. Pour moi et pour bcp, il y a un système prostitutionnel millénaire (donc misogyne et phallocrate) à démanteler, ça n'a rien à voir avec les autres luttes qui doivent être menées mais n'ont pas à être comparées.
Je constate aussi en te lisant que tu omets (presque ?) toujours de parler des clients. Or, bcp sont d'immondes personnages (voir les forums de punters). Comment se fait-il que tu évites de parler de ces gens sans qui il n'y aurait pas"besoin" de prostituées ?
Le reportage est visible en replay qq jour, si tu souhaites le voir, j'ai donné les liens à la page précédente
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Re: La prostitution n'est pas un métier
25.05.13 16:04
Euh désolée mais j'ai un peu l'impression de lire le discours d'un macho qui viendrait dire que la question du sexisme est un faux problème, que ça détourne des Vrais Problèmes, qu'il y a plus grave et plus urgent, et que personne n'est parfait. Ou comment faire en sorte de tuer tout engagement politique.LuxLisbon a écrit:Mais je suis persuadée qu'en allant chez chacun de vous, je trouverais des produits fabriqués de manière abusive. Qu'il s'agisse de vêtements, de nourriture, de produits technologiques, etc. Parce qu'il est impossible de faire attention à tout, parce que parfois on n'a pas d'offre alternative, parce que parfois on n'a pas les moyens d'acheter éthique.
Je suis comme vous, je fais attention à ce que j'achète (et je mange les oeufs de mes poules, par exemple), j'essaie d'aller cher des producteurs, d'acheter des vêtements fabriqués en Europe, mais je sais qu'il m'arrive de déroger. Voilà tout.
Et la société toute entière est la première à s'émouvoir du sort des prostituées, en fermant les yeux sur les 3/4 des produits mis en rayon dans les supermarchés. Le gouvernement nous fait la bonne morale, à base de "on va abolir la prostitution", sans songer une seule seconde à refuser les importations venues de Chine, par exemple. Ce n'est pas mon idée d'une société éthique et d'une politique responsable : les leçons de morale de ces gens-là, je les prendrais au sérieux quand elles ne seront pas dictées par des considérations économiques.
Re: La prostitution n'est pas un métier
26.05.13 10:22
LuxLisbon ce qui me choque dans ton discours (entre autres) c'est:
D'abord que tu compares prostitution et BDSM alors que ce n'est pas du tout la même chose. Oui y a des femmes qui aiment être attachées ou fessées. A moins de vouloir se détruire il n'est absolument pas raisonnable de pratiquer le BDSM en dehors d'un cadre sûr avec une personne de confiance (ou des…). La prostitution n'a donc rien à voir avec le BDSM, c'est une activité dangereuse qui ne se pratique pas avec des gens de confiance (souvent avec des inconnus mais même certains "habitués" deviennent parfois violents du jour au lendemain si l'on en croit les témoignages). De plus certaines femmes peuvent avoir comme fantasme de se prostituer, c'est possible, mais se faire payer pour quelques activités sexuelles pour l'expérience ou le fantasme que ça représente, ce n'est aucunement comparable avec le fait de vivre de la prostitution. Croire que c'est la même chose c'est vraiment, à mon avis, tout ignorer de la réalité de la prostitution.
Un autre truc me choque beaucoup c'est que tu pars du principe que la prostitution existera toujours et ne peut pas être combattue. Or, c'est simplement faux, à moins de considérer que les hommes sont tous des prédateurs sexuels ayant besoin d'utiliser le corps des femmes pour se masturber dedans, et que le patriarcat est naturel et non pas culturel. Ca mis ensemble avec le refrain "au fond les prostituées aiment ça se faire utiliser", ça donne un assez mauvais goût d'essentialisme nauséabond, avec en plus un pseudo-féminisme à base de "chacun fait ce qu'il veut et on doit pas juger". Sauf que là on parle de rapport de dominations, y a pas de "chacun fait ce qu'il veut" sans réfléchir aux conséquences de ce que l'on fait. Et il n'y a pas de "chacun fait ce qu'il veut" quand on parle d'une activité qui s'exerce au moins sous contrainte financière, et souvent sous plusieurs autres contraintes.
Enfin je suis assez d'accord avec Omnia, le fait de justifier l'utilisation de femmes pour les "besoins sexuels" des hommes par le fait que personne n'est parfait et qu'il y a des injustices dans le monde, c'est pas qu'un peu un discours machiste. Je trouve ça répugnant. C'est du même ordre que les gens qui défendent la consommation de viande industrielle sous prétexte qu'il y aurait d'autres problèmes dans le monde à régler avant de s'occuper des animaux. 70% des prostituées souffrent de syndrômes post-traumatiques mais selon toi on doit d'abord s'occuper d'avoir une mondialisation parfaitement égalitaire sans exploitation de main-d'œuvre avant de s'attaquer à ce sujet? (d'autant plus que si on suit ton raisonnement, "chacun fait ce qu'il veut" donc les exploités du monde entier font le choix d'être exploités…)
D'ailleurs est-ce que tu défendrais ainsi n'importe quelle activité rémunérée? N'est-ce pas complètement excessif? Que se cache-t-il derrière l'idée qu'on ne PEUT PAS se passer de prostitution?
D'abord que tu compares prostitution et BDSM alors que ce n'est pas du tout la même chose. Oui y a des femmes qui aiment être attachées ou fessées. A moins de vouloir se détruire il n'est absolument pas raisonnable de pratiquer le BDSM en dehors d'un cadre sûr avec une personne de confiance (ou des…). La prostitution n'a donc rien à voir avec le BDSM, c'est une activité dangereuse qui ne se pratique pas avec des gens de confiance (souvent avec des inconnus mais même certains "habitués" deviennent parfois violents du jour au lendemain si l'on en croit les témoignages). De plus certaines femmes peuvent avoir comme fantasme de se prostituer, c'est possible, mais se faire payer pour quelques activités sexuelles pour l'expérience ou le fantasme que ça représente, ce n'est aucunement comparable avec le fait de vivre de la prostitution. Croire que c'est la même chose c'est vraiment, à mon avis, tout ignorer de la réalité de la prostitution.
Un autre truc me choque beaucoup c'est que tu pars du principe que la prostitution existera toujours et ne peut pas être combattue. Or, c'est simplement faux, à moins de considérer que les hommes sont tous des prédateurs sexuels ayant besoin d'utiliser le corps des femmes pour se masturber dedans, et que le patriarcat est naturel et non pas culturel. Ca mis ensemble avec le refrain "au fond les prostituées aiment ça se faire utiliser", ça donne un assez mauvais goût d'essentialisme nauséabond, avec en plus un pseudo-féminisme à base de "chacun fait ce qu'il veut et on doit pas juger". Sauf que là on parle de rapport de dominations, y a pas de "chacun fait ce qu'il veut" sans réfléchir aux conséquences de ce que l'on fait. Et il n'y a pas de "chacun fait ce qu'il veut" quand on parle d'une activité qui s'exerce au moins sous contrainte financière, et souvent sous plusieurs autres contraintes.
Enfin je suis assez d'accord avec Omnia, le fait de justifier l'utilisation de femmes pour les "besoins sexuels" des hommes par le fait que personne n'est parfait et qu'il y a des injustices dans le monde, c'est pas qu'un peu un discours machiste. Je trouve ça répugnant. C'est du même ordre que les gens qui défendent la consommation de viande industrielle sous prétexte qu'il y aurait d'autres problèmes dans le monde à régler avant de s'occuper des animaux. 70% des prostituées souffrent de syndrômes post-traumatiques mais selon toi on doit d'abord s'occuper d'avoir une mondialisation parfaitement égalitaire sans exploitation de main-d'œuvre avant de s'attaquer à ce sujet? (d'autant plus que si on suit ton raisonnement, "chacun fait ce qu'il veut" donc les exploités du monde entier font le choix d'être exploités…)
D'ailleurs est-ce que tu défendrais ainsi n'importe quelle activité rémunérée? N'est-ce pas complètement excessif? Que se cache-t-il derrière l'idée qu'on ne PEUT PAS se passer de prostitution?
Re: La prostitution n'est pas un métier
26.05.13 18:31
Grunt a écrit:Tu es au courant que le STRASS s'oppose à cette vision réglementariste, car elle supposerait un contrôle de l'état sur la vie des prostitué-e-s ?Néanmoins, je me répète, mais des maisons closes avec contrôles fréquents permettraient justement de savoir que la personne prostituée est libre de son choix.
Mais le fait qu'il y ait des maisons closes inclus-t-il nécessairement qu'il y ait un contrôle de l'Etat ?
(ceci est une vraie question )
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